Qu’est-ce que la novation ?

La novation

La novation désigne l’opération juridique par laquelle une obligation est éteinte de telle sorte qu’elle est remplacée par une nouvelle. Les fondements juridiques de la novation se retrouvent dans les articles 1271 et suivants du Code civil. Ce mécanisme est essentiellement utilisée en droit privé, mais on y fait référence quelques fois en droit public, notamment en droit administratif dans la question de la mutabilité du contrat administratif.

Plusieurs exemples permettent d’illustrer la novation : Lorsque les parties décident de changer le débiteur ou le créancier de la dette, ou encore lorsqu’elles s’entendent pour modifier l’objet sur lequel portait le contrat, etc.

Il est normal que lorsqu’un contrat est conclu, celui-ci puisse prendre par la suite une nouvelle tournure juridique : Son extinction, une modification des termes, etc. À cet effet, il existe plusieurs causes qui peuvent stopper l’exécution du contrat et l’éteindre.

Nous pouvons citer, entre autres, la réalisation du paiement, les obligations convenues entre les contractants, la dation en paiement qui implique que le débiteur remet à son créancier une chose autre que ce qui était prévu au contrat, ou encore la compensation qui implique un changement de rôle où chaque partie est à la fois débitrice et créancière, etc.

C’est exactement dans ce sillage que se situe la novation. En effet, celle-ci fait partie des divers modes de fin des obligations contractuelles.

Pour mieux comprendre ce que recouvre le terme de la novation, nous commencerons par en donner un bref aperçu général (partie 1). Après avoir expliqué la notion de novation, nous allons la différencier des autres notions voisines. Ensuite dans une seconde partie, nous évoquerons son fonctionnement (partie 2). Il s’agira là de détailler les types de novations et d’évoquer ses effets.

Aperçu général de la novation

Définition et distinction

Définition de la novation

Prévue par le droit des obligations, la novation est une opération juridique qui permet de modifier l’exécution d’un contrat. Cette modification se traduit par la substitution d’une obligation nouvelle à une ancienne qui est éteinte. Par ailleurs, il n’existe pas de présomption de son effet contractuel et celui-ci doit émaner de certains faits et actes entre les parties au contrat. Une fois définie, il faut distinguer la novation de certaines autres notions juridiques qui y semblent plus ou moins proches.

Distinction avec les notions voisines

Différence entre Novation et cession de créance

Ces deux conventions ont le même but : permettre un changement du créancier ; on retiendra que la novation et la cession de créance ont une portée subjective. La différence se situe dans le fait que dans la novation, il faut le consentement entre les deux parties (le nouveau créancier et le débiteur) par rapport à la nouvelle créance : ce qui n’est pas le cas lors de la cession de créance.

Distinction entre la novation et la subrogation

Quand on parle de subrogation en droit civil, on fait référence au remplacement de certains éléments du contrat. Ce remplacement peut viser soit un droit réel (lorsqu’un bien donné est remplacé dans le patrimoine du créancier), soit un droit personnel (lorsqu’un nouveau créancier vient remplacer l’ancien).

Vu en tant que tel, la subrogation n’opère pas la fin de l’obligation, cependant elle opère en lieu et place de moyen de placement en transmettant la créance. A contrario, dans la novation, nous l’avons dit, ni les caractères de l’obligation ni ses sûretés ne changent.

La novation et la délégation

Dans la délégation une personne dénommée délégué prend l’engagement de l’execution de l’obligation auprès du délégataire, conformément à l’ordre que lui a donné le délégant. (voir : l’obligation in solidum pour aller plus loin).

Dans l’ancien droit français, les deux notions étaient mises ensemble parce que la délégation avait pour finalité la novation. Mais en réalité, ce qu’il faut noter est qu’il existe deux types de délégation : la délégation parfaite et la délégation imparfaite.

Des deux types de délégation, seule la délégation parfaite opère novation. Par ailleurs, c’est la délégation imparfaite qui s’impose comme la norme usuelle : ce qui nous amène à établir cette distinction juridique entre les deux notions.

Novation et dation en paiement

La dation en paiement est une opération juridique qui permet au débiteur de transférer la propriété d’une autre chose à son créancier en contrepartie de la dette due. Toutefois, il est important que ce dernier manifeste son acceptation de recevoir la nouvelle chose en lieu et place du paiement de la prestation due.

La dation en paiement semble se confondre quelquefois à la novation objective en ce sens que la dette primitive change en substitution d’un nouvel objet quasiment différent du précédent. Le point de différence se situe dans le temps : alors que la novation est une obligation à terme, la dation en paiement est instantanée : l’extinction de la dette est instantanée.

Maintenant que la novation est clarifiée et distinguée des autres notions, il faut se poser des questions par rapport à ses conditions.

Les conditions de la novation

Comme tout type de contrat, avant d’aborder ses spécificités, la novation doit d’abord obéir aux conditions générales de formation du contrat.

Les conditions générales liées aux contrats

Le cours de droit des contrats donne un aperçu général des conditions de validité des contrats. Ici, nous ferons un rappel des quatre conditions retenues.

Le consentement et la capacité

Il faut jouir de la capacité juridique avant de conclure tout contrat (Lire aussi : Cours sur les conditions de validité d’un contrat pour plus de détails), il en va de même pour la novation. Si l’une des parties n’a pas la capacité à conclure (un mineur non émancipé, un majeur incapable, etc.), le contrat court la nullité.

Quant au consentement, la volonté des parties doit être libre et exempte de tout vice comme l’erreur, la violence, le dol, etc. Ainsi, si l’un des cocontractants n’a pas donné son consentement de façon libre et éclairé, le contrat encourt également la nullité.

Précisons à ce niveau que l’un des contractants peut être aussi bien une personne physique qu’une personne morale.

La cause et l’objet

Tout contrat doit porter sur une chose (qu’une des parties s’engage à donner ou à apporter à son cocontractant) ou sur une prestation à fournir. Il s’agit de l’objet sur lequel porte le contrat et il doit être non seulement certain, mais aussi déterminé ou déterminable.

De la même manière, la cause de tout contrat doit être licite sous peine de nullité. Ainsi, un contrat qui vise à contourner les mesures réglementaires et légales en vigueur sera frappé de nullité.

Les conditions propres à la novation

Trois conditions spécifiques déterminent la novation.

Il doit exister une obligation primitive

Avant que n’intervienne la novation, il est important qu’il existe au préalable une obligation qui soit valable. Dans ce cas, l’invalidité de l’obligation primitive rend impossible la novation en ce sens que la nouvelle obligation sera dépourvue de cause.

Exemple pratique : Dans une convention de vente dûment établie, les parties décident plus tard de changer la monnaie dans laquelle devra être effectué le paiement.

Toutefois, lorsque l’acte nové est frappé de nullité relative (partielle), il est encore possible de faire exister la novation, mais en cas de nullité absolue, la novation n’est plus possible.

La nouvelle obligation doit succéder à l’ancienne

La novation crée un nouveau rapport d’obligation qui vient changer le lien de droit existant entre les parties. Elle implique l’extinction de l’ancienne obligation qui cesse d’être valable. Cette extinction induit la naissance d’une nouvelle obligation (un changement de contractant, de l’objet ou de la cause de l’ancienne obligation, etc.).

Exemple pratique : un bail est conclu pour deux ans avec le paiement d’un loyer payable en deux tranches. Les parties conviennent que désormais le loyer sera payable en une seule tranche. Cette nouvelle modalité change le rapport d’obligation entre les parties.

Toutefois, il est important de préciser qu’en cas de changement de débiteur suite à la novation, on ne saurait faire exister à l’encontre du nouveau débiteur les éventuels hypothèques et privilèges liés à la créance primitive (sauf réserves des créanciers).

La nouvelle obligation doit être différente de l’ancienne

L’ancienne obligation ne doit pas être égale à la nouvelle. De même, être en présence de deux obligations ne veut pas dire qu’il y a novation, encore faut-il que chacune d’elle soit distincte de l’autre. C’est ce qui est appelé l’aliquid novi.

Les parties doivent nourrir l’intention de nover (animus novandi)

C’est l’article 1273 du Code civil qui précise la nécessité de l’intention de nover. Cette obligation est même une exigence plus forte que le consentement requis lors de la validité des conditions du contrat. On doit sentir dans l’acte de novation la volonté claire et manifeste des parties de conclure le contrat. Aucune présomption ne pourrait être faite en matière de novation.

Exemple pratique : Supposons qu’un huissier de justice entreprend une mission de procédure collective dans une entreprise en difficulté. Les dirigeants de cette entreprise ne peuvent invoquer face à l’huissier, ni devant un tribunal, le bénéfice d’un statut de salarié en vue de jouir de la prise en charge particulière. Il s’agit d’un cas de novation de créance salariale et il ne sera point admis.

Soulignons à ce niveau que pour prouver l’intention de nover, on peut user de tous les modes de preuve possible (Code civil, Paris, Dalloz, 1969-70, art. 1273, p. 518).

Le fonctionnement de la novation

Les types de novation

On peut parler de novation dans plusieurs cas de figure.

Le changement du créancier

Lorsque, sous consentement exprès du débiteur, le créancier est changé dans un contrat donné, nous sommes dans un cas de novation. Cette opération est semblable au régime juridique de la cession de créances. La différence et l’avantage principal de la novation est qu’elle soustrait les parties aux obligations de publicité qui sont exigées lors du contrat de cession de créances.

Exemple pratique : Mr Pierre doit une dette de 500.000 à Mr Paul. Sous accord de Mr Pierre, la somme sera versée à Mr Jean vers qui Mr Pierre est maintenant redevable.

Le changement de débiteur

Ce cas est l’inverse du précédent puisqu’ici un nouveau débiteur vient prendre la place de l’ancien qui n’a plus de dette envers le créancier. Ce cas s’apparente à la délégation parfaite.

Exemple pratique : Mr Pierre doit une dette de 500.000 à Mr Paul. Sous accord de Mr Paul, c’est maintenant Mr Jean qui devra payer les sommes dues. Ainsi, Mr Pierre n’est plus redevable envers personne.

À ce niveau, il est important de préciser que la volonté manifeste du créancier entre en ligne de compte parce que c’est lui qui doit donner son assentiment à décharger le débiteur principal de l’obligation.

Exemple pratique : Une société X fait le nantissement de son fonds de commerce auprès d’une banque pour servir de garantie à une caution préalablement accordée au débiteur principal. Si la société est dans l’impossibilité de rembourser la dette, la banque peut décider, de son propre chef, de substituer celle-ci au débiteur principal.

Par ailleurs, mentionnons également que la novation apparait en quelque sorte comme une convention qui vient aggraver les engagements pris par le débiteur principal. C’est dans ce sens qu’au-delà du consentement requis pour la validité des contrats, il est recherché, à chaque fois dans la novation, la réelle intention de chacune des parties à nover.

Le changement de l’objet de l’obligation

Dans ce cas, aucune des parties au contrat ne change, mais c’est plutôt l’objet de l’obligation qui est différente ou encore ses modalités. Toutefois, il est impérieux que les obligations soient exécutées de bonne foi par les parties tout comme c’était déjà prévu dans l’ancien contrat.

Exemple pratique : Un contrat de forfait téléphonique est conclu entre un fournisseur et son client. Le client décide de changer le forfait téléphonique en un forfait internet auprès du même fournisseur.

Un changement de la cause de l’obligation

À ce niveau, c’est le titre juridique ou encore le fait générateur qui a prévalu à la conclusion du contrat qui change. Ce changement peut entrainer aussi comme dans le cas précédent un changement des modalités Exemple pratique : un contrat de bail précaire de quelques mois mute en un bail commercial de cinq années entraînant ainsi un changement du loyer à payer et de sa reconduction.

Les effets de la novation

Les effets directs de la novation

Extinction de la dette primitive

Selon l’article 1278 à l’article 1281.2 du Code civil, à travers la novation, la dette primitive est éteinte, de même que tous ses accessoires. Par accessoires, le législateur inclut aussi bien les actions que les exceptions et les divers moyens de défense dont pouvait se prévaloir l’ancien débiteur vis-à-vis du créancier.

Création d’une nouvelle dette

Appelée effet créateur, la nouvelle obligation contractuelle générée par la novation est semblable à la création d’un contrat indépendant, toutefois elle ne procède que de l’opération unique ayant mis fin à l’ancienne dette : on parle de discontinuité des obligations.

Les questions d’inopposabilité de la novation

L’opposabilité des exceptions aux débiteurs

Aucun des débiteurs ne peut invoquer, après novation, les exceptions attachées à l’obligation éteinte. Toutefois, les parties peuvent s’entendre de façon expresse pour admettre certaines exceptions : cette règle n’est pas d’ordre public.

Par ailleurs, lorsqu’il existe une obligation entre un créancier et des codébiteurs solidaires et qu’un contrat de novation est établi ensuite entre le créancier et l’un des quelconques codébiteurs, chacun des autres codébiteurs se trouve libéré de la créance.

*** Voir aussi : La définition et le principe de la liberté contractuelle. Suivez le lien pour accéder à la page. ***

L’opposabilité vis-à-vis des créanciers

À partir du moment où la novation prend effet, il est impossible pour le nouveau débiteur d’opposer au nouveau créancier une quelconque exception reliée à l’ancienne obligation. Ceci se comprend dans le sens où l’ancienne obligation étant éteinte. Dès lors, le débiteur n’y est plus tenu à l’égard de son créancier.

L’opposabilité à l’égard des tiers

À partir de quel moment la novation devient-elle opposable aux tiers qui réclament des droits sur la créance ancienne ? À cette question, le législateur a proposé que l’ordonnance interpose le régime de l’opposabilité au moment de la cession de la créance. Autrement dit, à compter du moment où l’acte juridique constatant la novation a été pris, il devient opposable à toute personne.

Cependant, malgré le fait que la novation produit l’extinction de l’obligation primaire, les tiers ont la possibilité d’autoriser un maintien des garanties.

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