La clause pénale est une clause que des contractants décident d’insérer dans une convention et par laquelle ils retiennent que la partie qui n’exécuterait pas son obligation contractuelle devrait alors payer à l’autre une certaine somme forfaitaire appelée indemnité.
Ce qu’il faut savoir c’est qu’en droit des obligations, les parties peuvent prévoir à l’avance de sanctionner les contractants lorsque l’un d’eux manque de remplir à une obligation contractuelle. Il leur est alors possible de prévoir des indemnités qui seront dues par le ou les défaillants. Ainsi, du fait de l’inexécution du contrat tel que prévu, la partie défaillante devra procéder à une indemnisation forfaitaire de son cocontractant qui se retrouve à subir les conséquences de la défaillance contractuelle.
Sachez qu’il est très facile de confondre la clause pénale avec une clause de dédit ou une clause limitative de responsabilité. Pourtant, de multiples différences existent entre ces notions du droit commun des obligations.
Dans le présent article, nous allons porter une attention particulière sur la clause pénale, en présentant les conditions qui entourent son insertion dans les contrats. Pour y parvenir, nous aborderons la clause pénale sous deux angles. Dans une première partie, nous présenterons les généralités de la clause pénale, sa définition, et ses conditions de validité. Puis dans une seconde partie, nous aborderons le régime juridique de la clause pénale.
Généralités sur la clause pénale
Utilité de la clause pénale
Lorsqu’on se pose la question de savoir : à quoi sert une clause pénale ? Deux utilités principales peuvent être mentionnées. Tout d’abord, du côté du créancier de l’obligation, la clause a pour but de lui garantir que le débiteur remplira l’obligation de moyens ou de résultat avec diligence. En effet, la clause sert de contrainte pour le débiteur qui subit une certaine pression car le créancier peut la faire jouer en cas d’inexécution des obligations contractuelles.
Ensuite du côté du débiteur, la clause pénale est aussi un moyen qui peut lui permettre de ne pas remplir ses ou son obligation contractuelle. En effet, un débiteur peu désireux de maintenir le lien contractuel, pourra grâce à la clause pénale, payer les indemnités retenues et ne pas exécuter ses obligations.
Cependant, il faut retenir que la clause pénale n’a pas vocation à être utilisée dans tous les domaines.
Domaines d’application de la clause pénale
C’est essentiellement en droit des contrats que l’on rencontre la clause pénale. Elle sert de garde-fou à tout manquement éventuel de la part de l’un des contractants. Toutefois, en droit français, on ne peut insérer une clause pénale dans tout type de contrat. En effet, elle est considérée comme étant une clause abusive dès lors qu’on la remarque dans certains domaines.
Par exemple, le code de la consommation a clairement précisé qu’une clause pénale est qualifiée de clause abusive lorsqu’elle vise le consommateur sous certains aspects. Tel est le cas d’une clause pénale qui met à la charge du consommateur une indemnité dont la valeur est anormalement élevée en cas d’inexécution de ses obligations.
En droit civil aussi, par exemple, il est impérativement interdit d’insérer une clause pénale dans certains contrats de bail. C’est par exemple le cas du contrat de bail d’habitation.
Pour rappel, voici une liste non exhaustive des différents types de contrats existants en droit des contrats parmi les plus courants : Contrat synallagmatique ou unilatéral, contrat à titre onéreux ou gratuit, contrat commutatif ou aléatoire, contrat de gré à gré ou d’adhésion, contrat à exécution instantanée ou successive.
Les conditions de validité de la clause pénale
Clarification conceptuelle
Avant de présenter les exigences relatives à la validité d’une clause pénale, il est important de la distinguer de certaines notions voisines.
La clause pénale n’est pas une indemnité d’immobilisation
Il est essentiel de ne pas confondre ces deux notions, surtout compte tenu du fait que chacune d’elles apparait très souvent dans les contrats.
En effet, l’indemnité d’immobilisation n’existe que dans le cadre d’une promesse unilatérale de vente. Cette indemnité, nommée dépôt de garantie, correspond à un montant que le promettant recevra du bénéficiaire de la promesse de vente si celui-ci, dans le délai retenu, ne concluait pas le contrat de vente. Or tel n’est pas le cas de la clause pénale qui, elle, est relative à une inexécution des obligations contractuelles du cocontractant.
Par ailleurs, remarquons que le fait qu’une indemnité d’immobilisation existe avant que ne soit conclue la vente n’empêche pas les parties au contrat d’y insérer une clause pénale assortie du paiement d’une indemnité forfaitaire dans la situation où l’un des contractants manque de s’exécuter.
La clause pénale n’est pas une clause de dédit
Ces deux notions semblent poser problème à bien des égards, mais voici ce qu’il faut comprendre. Une clause de dédit est une clause qui, insérée dans un contrat, accorde à chaque contractant la possibilité de ne pas exécuter ses obligations en apportant une compensation pécuniaire à l’autre cocontractant. Autrement dit, nous sommes dans une situation où l’un des contractants décide de résilier le contrat de façon unilatérale. Toutefois, il fait accompagner cette résiliation du paiement d’une indemnité.
Par ailleurs, dans une clause pénale, l’indemnité forfaitaire vise à la réparation des torts subis par le cocontractant à cause de l’inexécution de l’autre partie. Dans la clause de dédit, en revanche, l’indemnité vise à la compensation de la résiliation unilatérale des relations contractuelles par l’une des parties.
La clause pénale est un type de clause limitative de responsabilité
Les clauses limitatives de responsabilité font peser sur la tête des parties certaines pénalités. Celles-ci sont dues en cas de mauvaise exécution ou d’inexécution de leurs obligations. Vue comme telle, la clause pénale est assimilable à une clause limitative de responsabilité en ce sens qu’elle soumet aussi le débiteur de l’obligation à verser à l’autre partie une indemnité forfaitaire.
Mais pour plus de précision, il faut noter qu’une clause pénale est exclusivement une clause limitative de réparation.
Les critères de validité de la clause pénale
Deux conditions primordiales doivent être remplies pour que la clause pénale soit considérée comme valide devant le juge. En premier lieu, la clause pénale doit figurer dans le contrat. Elle doit y être stipulée de façon claire et expresse. Ainsi, une clause pénale qui fait l’objet d’une stipulation tacite ou dont la compréhension semble ambigüe sera rejetée par les juges du fond. Devant les magistrats, une pareille clause pénale est réputée non écrite.
Par ailleurs, les clauses pénales doivent provenir d’une décision conventionnelle. Ceci signifie que chacun des contractants a exprimé sa volonté librement et donné son accord pour faire figurer la clause pénale dans le contrat. La justification ici c’est qu’on ne peut sanctionner un contractant par une clause dont il n’a pas connaissance ou à laquelle il n’accorde pas son consentement.
Cependant, il faut aussi ajouter que la clause pénale doit être prévue de façon anticipée. Autrement dit, c’est au moment de la conclusion du contrat que les parties doivent s’entendre pour y faire insérer une clause pénale.
NB : En parlant de responsabilité et d’obligation en droit des contrats, consultez aussi : Les principes et les domaines d’application de l’obligation in solidum. Une autre notion très importante créée par la Cour de cassation en droit des contrats.
Le régime juridique relatif à la clause pénale
Mode de fonctionnement de la clause pénale
La mise en œuvre de la clause pénale
Comme souligné ci-dessus, la condition essentielle pour faire jouer une clause pénale consiste à l’inexécution d’une obligation à la charge du contractant. Exécuter son obligation ne veut pas simplement dire faire ce que prévoit le contrat, mais encore faut-il le faire dans les temps et délais convenus. Ainsi, en cas de retard dans l’exécution de l’obligation, le cocontractant est en droit de faire appliquer la clause pénale.
La conséquence qui découle de ce principe est que lorsque survient un litige, le juge ne cherchera pas à savoir si le cocontractant a réellement subi un préjudice ou non. Il lui suffit de constater que l’autre partie fautive n’a pas correctement exécuté son obligation principale, ce qui a poussé son cocontractant à l’application de la clause pénale.
Toutefois, lorsqu’il existe des circonstances exceptionnelles ou un cas de force majeure, l’application de la clause pénale peut faire l’objet de certaines limitations par le juge.
Par rapport à la procédure pour mettre en œuvre la clause pénale, celle-ci requiert des étapes préalables. Il est important que la partie fautive soit mise en demeure par le créancier de l’obligation. Il s’agit d’une mise en demeure préalable par laquelle il est notifié au débiteur de payer la pénalité retenue dans la clause pénale. Le créancier peut se faire aider d’un huissier au moment de mettre en demeure son débiteur.
Cependant, cette mise en demeure préalable n’est plus exigée lorsque manifestement l’inexécution de l’obligation par le débiteur est volontaire ou que celui-ci décide clairement de ne pas s’exécuter.
Si par exemple, le débiteur mentionne clairement à son créancier qu’il ne remplira pas sa part de contrat, celui-ci n’a plus besoin d’une mise en demeure préalable pour faire jouer la clause pénale.
Le schéma ci-dessous présente le contenu de la mise en demeure.
Le caractère libératoire de la clause pénale
Une question se pose avec acuité concernant les clauses pénales : possèdent-elles un caractère libératoire ? Expliquons le contenu du caractère libératoire.
Par caractère libératoire, il faut comprendre que dès lors que le débiteur effectue le paiement de l’indemnité prévue par la clause pénale, le créancier n’est plus en droit de lancer contre lui une action en responsabilité auprès des cours et tribunaux.
Ainsi, cette question concernant le caractère libératoire de la clause pénale a suscité plusieurs débats et a influencé la jurisprudence sur plusieurs aspects.
Pour certains théoriciens du droit, la clause pénale possédait un caractère libératoire et c’est la raison pour laquelle il n’était pas possible de la cumuler avec le paiement de dommages et intérêts. Pour d’autres, une clause pénale ressemblait fortement au paiement d’une astreinte, surtout lorsqu’elle était invoquée au moment du retard de paiement. Or nul ne peut prononcer le paiement d’astreinte si ce n’est un juge, ce qui impliquait alors que la clause pénale n’ait pas un caractère libératoire. C’est ce qui ressort dans l’arrêt rendu par la 1re chambre civile de la Cour de cassation en date du 28 février 1989.
Face à ces multiples débats, la Cour de cassation a pris une décision importante à travers un arrêt rendu en date du 14 juin 2006. À cette occasion, la cour a confirmé que la clause pénale possédait un caractère libératoire en ce sens que l’indemnité reçue par le créancier sert à le dédommage. Ainsi, aucun ne litige ne saurait plus naître au titre de cette relation contractuelle, une fois que les sommes lui sont versées.
Les effets de la clause pénale
La conséquence directe de la clause pénale
Celui dont la responsabilité contractuelle (Voir : Présentation générale de la responsabilité contractuelle) est attaquée c’est-à-dire le débiteur de l’obligation doit procéder au paiement d’un montant forfaitairement retenu au créancier. Il est important d’insister sur le fait que l’indemnité a un caractère forfaitaire : il ne doit ni être dérisoire ni excessif.
En réalité, il ne s’agit pas pour le créancier de procéder au recouvrement des sommes qui lui sont dues par l’inexécution de l’obligation du débiteur. Ainsi, le montant de l’indemnité ne doit pas forcément correspondre au manque subi par le créancier.
Limitation du pouvoir du juge
Pour rappel, lorsqu’un litige relatif à l’inexécution d’une obligation contractuelle est porté devant le juge, celui-ci dispose des moyens traditionnels de sanction de la partie fautive. Le juge peut ainsi obliger le débiteur à une exécution forcée de son obligation. La sanction peut consister aussi au paiement par celui-ci de dommages et intérêts au créancier en vue de le soulager du préjudice subi. Par ailleurs, le juge dispose du pouvoir de procéder à la résiliation du contrat.
En dehors de tous ces cas, le juge peut prononcer la nullité relative du contrat ou la nullité absolue, s’il s’avère que celui-ci n’a pas respecté les conditions requises pour sa conclusion. Cependant, lorsqu’une clause pénale est insérée dans le contrat par les parties et que l’une d’elles la fait jouer, le juge devient limité dans la résolution du litige. Il ne peut plus prononcer, par exemple, le paiement de dommages et intérêts. On dit dans ce cas que son pouvoir souverain d’appréciation est limité par les clauses pénales.
Les pouvoirs du juge en cas d’application de la clause pénale.
En tant que garant de l’ordre public, le juge conserve malgré tout certains pouvoirs dans l’analyse de la clause pénale. Ainsi, son intervention diffère selon que l’inexécution par le contractant soit partielle ou que ce soit une inexécution totale.
L’inexécution totale de l’obligation contractuelle par le contractant
Il faut recourir à l’article 1231-5 du Code civil pour mieux s’apercevoir de ce dont il est question. Le premier alinéa de cet article indique que le montant retenu à titre de dommages et intérêts ne doit pas être dérisoire. Toutefois, il ne doit pas non plus s’agir d’une somme excessive.
C’est l’alinéa 2 qui indique le rôle du juge dans la pénalité. Selon cet alinéa, qui est d’ordre public, le juge a la capacité de modérer l’indemnité retenue. Par exemple si le montant prévu dans la clause pénale est manifestement excessif, le juge a la capacité de le diminuer. De même, si le montant est manifestement dérisoire, le juge peut le rehausser. Si les parties décident d’insérer d’autres clauses limitatives du pouvoir du juge, celles-ci seront considérées comme non écrites.
Mais on peut se demander : Pourquoi le législateur autorise-t-il le juge à modérer la pénalité ? Le but visé par le législateur est que seul le préjudice effectivement subi soit réparé. Ainsi, si le montant de la clause pénale dépassait largement le préjudice effectivement subi, il pourrait être revu à la baisse par le juge. De même si le juge constate que le montant retenu par la clause pénale ne couvrait pas le préjudice résultant de l’inexécution de l’obligation du débiteur, il pourra le rehausser.
Remarquons que le principe de la force obligatoire des contrats est hypothéqué par ce pouvoir de révision accordé au juge. C’est pour cette raison que ce n’est qu’en cas d’un déséquilibre significatif et sérieux que le juge est appelé à agir.
L’inexécution totale de l’obligation contractuelle par le contractant
Pour ce qui concerne l’inexécution partielle, c’est plutôt l’alinéa 5 de l’article 1231-5 du Code civil qui aborde cette question. Dans ce cas, le juge ne peut statuer que dans un sens. Celui de la diminution de l’indemnité de façon proportionnelle à la partie non exécutée de l’obligation.