C’est quoi la cession d’un fonds de commerce ?

Cession d’un fonds de commerce

Une cession d’un fonds de commerce est une opération qui consiste à vendre tous les éléments corporels et incorporels qui sont utilisés pour exploiter une activité commerciale ou une activité industrielle. La cession d’un fonds de commerce consiste en somme à céder les éléments qui font la valeur d’un fonds de commerce.

Ce qu’il faut savoir, c’est qu’un « fonds de commerce » est une notion très importante en droit commercial, bien que n’ayant pas été explicitement défini en France par aucun texte juridique. La définition que l’on peut lui attribuer tient sa source de la jurisprudence essentiellement.

Ainsi, le fonds de commerce est une notion abstraite qui regroupe à la fois des éléments corporels et incorporels comme annoncé un peu plus haut. Le fonds de commerce est donc un ensemble constitué d’éléments permettant d’exercer une activité commerciale.

Cet ensemble regroupe aussi bien des éléments corporels comme du matériel de travail, du mobilier ou des matières premières ou encore des marchandises que des éléments incorporels comme le droit au bail, le nom commercial, la clientèle, etc.

Lorsque nous parlons de cession du fonds de commerce, il s’agit aussi du contrat au moyen duquel le propriétaire du fonds de commerce se dépossède de son droit de propriété en le transférant à un acquéreur en échange d’un prix négocié et arrêté de commun accord.

Pourtant, la cession de fonds de commerce n’est pas une opération facile à réaliser. Elle fait appel à l’application de nombreuses formalités et exigences juridiques.

À travers cet article, nous vous proposons de découvrir les spécificités de cette opération juridique en abordant dans une première partie, les conditions que doit satisfaire toute cession du fonds de commerce, puis d’aborder dans une seconde partie, les effets que ladite cession pourrait produire à l’égard des différentes parties qui y sont impliquées.

Cession d’un fonds de commerce : Les conditions à remplir

Notification préalable des salariés

La loi a fait obligation au cédant d’un fonds de commerce d’informer préalablement les salariés de l’entreprise (puisqu’ils disposent d’un droit de préemption). Cette information préalable qu’il convient de délivrer aux salariés obéit à des spécificités en fonction de la taille de l’entreprise dont le fonds de commerce est cédé.

Lorsqu’il est question d’une entreprise dont l’effectif est inférieur à 50 salariés, il incombe au cédant de porter l’information concernant la cession du fonds de commerce aux employés, au moins deux mois avant la date prévue de la cession.

Cette information permettra aux salariés de faire une offre d’achat au cédant du fonds de commerce au cas où ils désirent l’acquérir. C’est une exigence qui trouve sa source dans l’article L141-23 du Code de commerce.

S’agissant des entreprises ayant un effectif de salariés compris entre 50 et 249, l’article L141-28 du Code de Commerce fait l’obligation au propriétaire (le cédant) de leur notifier le projet de vente du fonds de commerce, au même moment que l’information est donnée au comité d’entreprise. Cela leur permettra de faire une proposition d’acquisition du fonds à céder au cas où ils en auraient la volonté.

Il est important de faire remarquer que dans la situation où le fonds de commerce à céder se trouve dans une zone ou un périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat de proximité, il est impératif de procéder à une déclaration préalable à la commune. Cette déclaration donnera la possibilité à la commune d’exercer son droit de préemption dans un délai de deux mois, ce qui pourrait lui permettre d’acquérir ledit fonds si elle le désire.

Lorsque le cédant manque à cette obligation cruciale d’information ou de notification préalable, il s’expose au paiement d’une amende qui peut atteindre un montant de 2 % du prix de la cession du fonds de commerce.

Ainsi, tout employé qui aurait manqué de faire une offre d’acquisition simplement parce qu’il n’a pas été informé du projet de cession du fonds de commerce pourra intenter une action en justice afin de demander la nullité de la cession du fonds de commerce. Il faut donc satisfaire à cette exigence avant la signature de l’acte de cession.

Les conditions de fond et de forme de la cession du fonds de commerce

La cession d’un fonds de commerce étant une vente, il est nécessaire qu’elle respecte des conditions de fond et de forme ainsi que celles relatives à des formalités de publicité.

Conditions de fond de la cession du fonds de commerce

Comme nous l’avions mentionné plus haut, les conditions de fond régissant la cession d’un fonds de commerce sont les mêmes que celles du droit commun de la vente. Il serait donc pertinent pour nous de rappeler lesdites conditions.

La capacité

Concernant la capacité, il faut ici mentionner que la vente ou cession d’un fonds de commerce est un acte de commerce par accessoire, contrairement à l’acte de commerce par nature, et il importe que le cédant et le cessionnaire jouissent de la capacité commerciale.

Cela signifie en réalité qu’un mineur ou un majeur sous protection ne saurait être autorisé à réaliser une opération de cession d’un fonds de commerce.

Cependant, cette possibilité pourrait être accordée lorsque la cession du fonds de commerce se déroule sous l’autorité des parents ou des administrateurs légaux, et ce, sous contrôle judiciaire.

Pour ce qui concerne un mineur émancipé, étant donné qu’il est autorisé à passer les actes de la vie civile, il pourra procéder à l’achat ou à l’acquisition d’un fonds de commerce. Toutefois, il lui est interdit de faire des actes de commerce à titre habituel, ce qui signifie que même s’il acquérait un fonds de commerce, il ne pourrait ainsi pas procéder à son exploitation. Il se verra donc dans l’obligation de faire recours à la location-gérance dans ce cas précis.

Le majeur sous tutelle pourra également céder un fonds de commerce avec l’autorité du conseil de famille ou sous le regard du juge des tutelles. Le majeur sous curatelle en ce qui le concerne devra recourir à son curateur pour vendre un fonds de commerce tandis que le majeur sous sauvegarde de justice pourra de son côté acheter ou vendre sans assistance aucune, un fonds de commerce.

Le consentement

S’agissant de la cession d’un fonds de commerce, les différentes parties doivent consentir, car il s’agit d’une condition indispensable pour le transfert de propriété du fonds. Pour que l’on parle de consentement, il faut qu’aussi bien le cédant et l’acquéreur du fonds se soient mis d’accord sur la chose et le prix. Toutefois, l’appréciation du consentement est du domaine du juge. Le consentement doit obéir aux exigences énoncées par l’article 1109 du Code civil et doit donc être exempt d’erreur, de dol (définition juridique juste ici) ou de la violence.

Le prix

Il convient de préciser ici que les parties doivent décider du prix de la cession du fonds de commerce. La loi n’impose aucune exigence spéciale aux parties en ce qui concerne le prix du fonds de commerce à céder sauf à ce que ce prix ne soit vil ni dérisoire et qu’il doit équivaloir au fonds de commerce. Il est donc indispensable que le prix soit fonction de la valeur réelle du fonds de commerce de façon à éviter que le contrat de cession se perçoive comme étant abusif.

Il faut aussi que le prix soit l’équivalent de ce que vaut le fonds de commerce, puisqu’en absence de prix, le contrat encourt la nullité. Cependant, dans le cas où le fonds de commerce à vendre dispose d’un passif très important, la cession pour un prix symbolique peut être admise.

En plus de cela, il faut que le prix de la cession du fonds de commerce soit sincère et réel. Lorsque l’on prévoit par exemple une contre-lettre pour dissimiler une partie du prix, ceci peut donner lieu à une nullité de la cession, accompagnée des sanctions fiscales et pénales.

Conditions de forme de la cession d’un fonds de commerce

L’article L. 141-1 du Code de commerce imposait jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi du 19 juillet 2019 (n°2019-744) que certaines mentions obligatoires soient énoncées dans l’acte de vente sous peine de nullité.

Voici les mentions en question :

  • L’identité du précédent vendeur, la date et le type de l’acte d’acquisition ainsi que le prix pour ce qui concerne les éléments incorporels, les marchandises et même le matériel s’il y a lieu ;
  • Le point des privilèges et nantissements reliés au fonds de commerce dont la cession est prévue ;
  • Les chiffres d’affaires enregistrés par le cédant au cours des trois derniers exercices comptables du fonds à céder. Ce nombre peut être réduit à la durée de possession du fonds si le cédant l’a acquis il y a moins de trois ans.
  • Les résultats d’exploitation pendant les trois dernières années précédant l’exploitation du fonds ou de la durée d’acquisition de ce fonds si c’est inférieur à trois ans ;
  • Les détails du bail, sa durée, les noms et adresses du cédant et du bailleur.

Il ne s’agissait cependant que d’une nullité relative qui pouvait être invoquée par l’acheteur. Il était par ailleurs tenu de formuler la demande en nullité dans un délai maximum d’un an à compter de la date à laquelle la cession a eu lieu. Mais le juge ne pouvait prononcer la nullité de l’acte de cession que si l’omission de l’une des mentions a pu vicier le consentement de l’acquéreur.

Néanmoins, depuis l’avènement de la loi n° 2019-744 du 19 juillet 2019, ces mentions obligatoires énumérées par l’article L. 141-1 du Code de commerce ont largement été assouplies pour la réalisation de l’acte de cession d’un fonds de commerce.

Les conditions relatives à la publicité

La cession de fonds de commerce doit obligatoirement faire l’objet d’une publicité dans un délai de 15 jours à compter de la date de la cession. Cette publicité doit se faire au Bulletin Officiel des Annonces Civiles et Commerciales (BODACC) sur un support destiné à recevoir les annonces légales. La justification de cette mesure de publicité dans les annonces légales à travers le bulletin officiel des annonces civiles se retrouve dans un souci de protection des créanciers du cédant.

Ainsi, dès que la cession est publiée dans le bulletin officiel des annonces civiles et commerciales, les créanciers du vendeur disposent de la possibilité de faire opposition au paiement dans un délai de 10 jours.

Il faut ici comprendre que cette opposition se fait uniquement au moyen d’un acte extrajudiciaire ou par le moyen d’une lettre recommandée avec accusé de réception.

L’article L141-17 du Code de commerce prévoit par ailleurs que la violation de la mesure de publicité est sanctionnée par l’inopposabilité de la vente aux tiers, et donc ils supposent que cette vente n’a jamais eu lieu.

Il est tout de même pertinent de souligner que tous les créanciers ne disposent pas des mêmes droits. D’après le droit des biens, les créanciers chirographaires ne disposent d’aucun droit réel sur les biens du fonds de commerce. Ils disposent cependant d’un droit de gage sur les biens du débiteur. La mesure de publicité à leur égard est indispensable dans le but de les tenir informés des modifications dont peut ainsi faire l’objet le patrimoine de leur débiteur.

S’agissant des créanciers inscrits ou opposants, ils disposent d’un délai de 20 jours suivant la deuxième publication de la cession du fonds de commerce afin de demander une vente aux enchères publique. Tout créancier qui décider d’utiliser cette possibilité qui lui est offerte doit tout de même se porter acquéreur et majoré d’1/6è par rapport au prix de vente initial du fonds de commerce.

Concernant les créanciers disposant d’une sureté, c’est-à-dire d’un droit réel sur un élément précis du fonds de commerce, ils disposent d’un droit de préférence. Ils peuvent donc poursuivre ce bien en quelque main qu’il se trouve, même après sa vente. Ces créanciers seront privilégiés par rapport aux autres créanciers et seront les premiers à se faire payer sur le prix de vente dudit bien.

La cession d’un fonds de commerce devant se faire grâce à un acte authentique, il ne serait pas possible d’y recourir par un acte sous seing privé.

Aussi, les éléments devant faire l’objet de la cession doivent être clairement identifiés et de façon générale, les éléments ci-après sont cédés :

Les éléments incorporels comme la clientèle, l’enseigne, le nom commercial, l’assurance, les droits de propriété intellectuelle comme les brevets, les logiciels, une marque ou même des autorisations administratives comme un agrément d’exercice, des licences d’exploitation et bien d’autres.

Les éléments corporels comme le matériel, les mobiliers ou même de l’outillage doivent faire l’objet d’un inventaire détaillé et estimatif.

Dans le but de se prémunir contre tout type de risque ou d’éviter tout litige ou contentieux à l’avenir, il est toujours recommandé aux parties de bien cibler les éléments du fonds de commerce devant faire l’objet de la cession.

Les éléments ci-après ne sont généralement pas transmis à l’acquéreur d’un fonds de commerce :

  • Les créances et les dettes : Elles ne sont pas transmises au cessionnaire, sauf s’il y a une clause de solidarité fiscale entre le cédant et le cessionnaire
  • Les contrats : Ils ne sont pas transmissibles sauf ceux dont la nature est indispensable à l’exploitation du fonds et qui se trouvent de ce fait obligatoire à transmettre
  • Les documents financiers ou comptables, même si l’obligation de consulter les documents relatifs aux trois derniers exercices comptables subsiste
  • Les livres de commerce et les immeubles
  • Les actions en justice à l’égard du cédant
  • L’autorisation d’occupation d’un domaine public : Cette obligation est accordée à titre personnel. Il est donc de l’obligation de l’acquéreur de solliciter à nouveau une autorisation d’exploitation du domaine public sur lequel était installé le fonds de commerce dont la cession est envisagée, s’il a l’intention d’utiliser ce même emplacement

En parlant de créances et de dettes, lisez aussi notre cours sur le « régime juridique de la cession de créances » : Cliquez ici si vous voulez tout savoir !

Cession du fonds de commerce : les différents effets de la cession du fonds

Lorsque la cession d’un fonds de commerce se réalise, cela produit des effets aussi bien à l’égard du cédant que de l’acquéreur.

Les effets de la cession d’un fonds de commerce pour le cédant

Les obligations du cédant

Ces obligations sont les mêmes que celles découlant du droit commun de la vente. Cependant, lesdites obligations ne sont exigées que si la vente est conclue. Lorsque les parties sont toujours au stade d’un compromis de vente, ces obligations ne sont pas encore nées puisqu’il ne s’agit que d’une promesse.

Comme dans tout contrat de vente, le cédant d’un fonds de commerce doit garantir à l’acheteur la délivrance c’est-à-dire la mise à disposition du fonds cédé, la garantie d’éviction ainsi que la garantie des vices cachés puisque ces vices s’ils sont cachés empêcheront une jouissance paisible.

En plus de cela, le cédant du fonds de commerce se doit de ne pas faire concurrence avec le cessionnaire dudit fonds. De plus, le vendeur doit s’abstenir de tout comportement qui perturberait la jouissance du fonds de commerce de l’acquéreur. Cette obligation de non-concurrence pèse sur le vendeur d’un fonds de commerce.

C’est pourquoi il n’est pas possible au cédant du fonds de commerce de conserver la clientèle liée au fonds de commerce cédé, et de se réinstaller dans les environs du fonds cédé afin d’exercer la même activité.

Dans le but de s’assurer que cette obligation pourra être respectée par le cédant, une clause de non-concurrence est souvent insérée dans un acte de commerce ou un acte de vente, prévoyant une certaine durée pendant laquelle, le vendeur ne peut se permettre de se réinstaller dans le périmètre du fonds cédé.

La validité de cette clause de non-concurrence est soumise à des conditions. Ainsi, elle doit présenter un intérêt légitime pour son bénéficiaire et se limiter à son objet, notamment celui en lien avec les activités menées autrefois avec le fonds cédé.

Cette clause doit en outre être limitée dans le temps et dans l’espace. Elle ne peut donc pas être une clause valable indéfiniment. (Cass. Com. Du 4 mai 1993, n° 91-17937).

Les droits du cédant

Les droits du cédant d’un fonds de commerce peuvent se résumer ainsi qu’il suit :

  • Privilège du vendeur du fonds de commerce : Il s’agit d’un privilège donnant la possibilité au cédant d’un fonds de commerce d’être payé par préférence aux autres créanciers du cessionnaire sur la valeur du fonds de commerce cédé
  • L’action résolutoire : en cas de non-paiement du prix de cession d’un fonds de commerce, le vendeur peut procéder à une action résolutoire tendant à invalider ladite cession

Les effets de la cession d’un fonds de commerce pour le cessionnaire

Il faut dire que payer le prix de cession du fonds est l’effet essentiel à l’égard de l’acquéreur d’un fonds de commerce.

Il doit satisfaire à l’obligation de paiement du prix dans un délai suivant l’expiration du délai de 10 jours qui est accordé aux créanciers du cédant afin de faire opposition par rapport à la cession du fonds de commerce. Le respect de cette obligation à l’expiration du délai de 10 jours est imposé par l’article L141-17 du Code de Commerce.

De façon générale, l’acquéreur d’un fonds de commerce l’achète à crédit. Ainsi, le vendeur du fonds de commerce est protégé par un privilège légal dont on a parlé précédemment. Ce privilège lui permet notamment de ne pas s’exposer à un risque d’insolvabilité de l’acquéreur.

Demander une annonce légale après la cession d’un fonds de commerce

La cession d’un fonds de commerce, cette transaction empreinte de gravité, réclame non seulement une vigilance juridique, mais aussi une communication adaptée. En effet, la procédure administrative post-cession exige la publication d’une annonce légale. Cette dernière n’est pas une simple formalité : elle confère transparence et légitimité à l’opération. Un expert doit commander la publication de votre annonce légale en ligne. Dès lors, comment s’assurer de la conformité et de la pertinence de cette annonce ?

La première étape réside dans le choix d’un journal habilité. Cette sélection ne doit pas se faire à la légère. Pencher pour un titre reconnu au niveau du département de la cession évite les écueils de non-conformité. Par ailleurs, la rédaction du contenu doit être précise, reprenant les détails essentiels : identités des parties, nature et localisation du fonds, prix de cession, et tout élément que la loi juge nécessaire.

L’ère digitale offre aujourd’hui des facilités inégalées. Nombreuses sont les plateformes spécialisées qui, outre la publication, fournissent des modèles de rédaction, gages d’une conformité sans faille. L’on pourrait citer à titre illustratif les simulateurs en ligne qui, après avoir recueilli quelques informations clés, génèrent un texte répondant aux normes. Le coût est certes un élément à surveiller, mais l’exactitude reste le pilier central de cette démarche, assurant ainsi une cession transparente et irréprochable aux yeux de la loi.

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