L’arrêt Goodwin du 11 juillet 2002 de la CEDH traite de la violation des droits de l’Homme notamment des personnes transsexuelles. La violation alléguée touche fondamentalement les articles 8 et 12 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CSDHLF) qui concerne le droit au respect de la vie privée et familiale ainsi que le droit au mariage.
Aux termes des dispositions de l’article 8 de CSDHLF, tout individu a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Mais il peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit. Ainsi, les Etats-parties peuvent remodeler ce droit dans l’intérêt de la sauvegarde de la démocratie, de la sécurité nationale, de la sûreté publique, de l’ordre public, etc.
Chaque Etat a le pouvoir d’adopter des textes de loi pour s’adapter à la situation en vue de sauvegarder l’ordre public, la sécurité nationale, l’intérêt économique national, la sûreté nationale. Néanmoins, l’interprétation de cet article est de la Cour CEDH.
Quant à l’article 12 de la même convention, on en retient que la réglementation du droit de se marier ou de fonder une famille est laissée aux législateurs nationaux. Les lois nationales régissant l’exercice de ce droit. Le droit interne en organise selon s’est nécessité. Cette organisation laissée à l’appréciation de chaque partie ne voudra pas dire qu’il peut restreindre à bon vouloir ce droit.
En effet, l’arrêt Goodwin est un arrêt rendu le 11 juillet 2002 par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) qui constate selon les faits de la violation du droit au respect de la vie privée et familiale ainsi que le droit au mariage. C’est une affaire qui oppose Christine Goodwin, transsexuelle à l’État du Royaume-Uni devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme.
Selon les faits de l’espèce, la requérante-Christine Goodwin a saisi la Cour CEDH pour se plaindre de la non-reconnaissance juridique de sa nouvelle identité sexuelle. Elle dénonce en particulier la manière dont elle avait été traitée dans les domaines de l’emploi, de la sécurité sociale et des pensions et l’impossibilité pour elle, de se marier en raison de sa nouvelle transformation physique. Les services de l’Etat civil, de l’emploi et de la sécurité sociale ne reconnaissent pas sa nouvelle identité ni son changement de sexe.
C’est pourquoi elle défère le contentieux de sa non-reconnaissance à la haute juridiction en matière des Droits de l’Homme de l’Union Européenne. Contre toute attente, malgré les risques de heurter la rigidité de la législation anglaise sur le refus de reconnaître dans son droit interne en l’état actuel, la CEDH prononce la violation du droit à la reconnaissance de la nouvelle identité des transgenres et le droit de se marier. Cet arrêt suscite un double intérêt touchant fondamentalement au droit au respect de la vie privée et familiale ainsi qu’au droit de se marier.
C’est pourquoi l’intérêt suscité par cet arrêt de la CEDH soulève la question de savoir : En quoi l’arrêt Goodwin a-t-il fait évoluer la jurisprudence sur le droit des personnes transsexuelles relativement au respect du droit à la vie privée et du droit de se marier ?
L’arrêt Goodwin est une jurisprudence de la CEDH qui a fait une novation par un revirement au regard des droits personnes transsexuelles, à travers un double revirement bénéfique pour toutes personnes reconnues comme telles au relativement au respect du droit à la vie privée et familiale puis du droit de se marier.
UNE NOVATION JURISPRUDENTIELLE AU REGARD DES DROITS DES TRANSSEXUELS
L’arrêt Goodwin est une jurisprudence novatoire. Il s’inscrit néanmoins dans une évolution jurisprudentielle de la Cour européenne des droits de l’homme en matière des droits de l’Homme notamment les droits des personnes transgenres.
L’évolution jurisprudentielle conduisant à l’arrêt Goodwin
La Cour Européenne des Droits de l’Homme a pendant longtemps refusé de reconnaître la violation de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CSDHLF) au profit des personnes transsexuelles.
L’arrêt Goodwin fait partie d’une suite de jurisprudences rendue par la Cour Européenne des Droits de l’Homme. Mais elle consacre une rupture de la position de la CEDH respectée pendant trop longtemps fermée sur la question de la violation des articles 8 et 12 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales à l’égard des personnes transsexuelles.
Autrement dit, la Cour Européenne des Droits de l’Homme avait une réticence à accéder à la demande du constat de la violation des droits des personnes transgenres depuis l’arrêt Rees contre le Royaume-Uni rendu le 17 octobre 1986 jusqu’à l’arrêt Sheffield et Horsham c. Royaume-Uni en date du 30 juillet 1998.
Il y a donc une série d’arrêt de la Cour Européenne des Droits de l’Homme avait rendu allant dans le sens du rejet de la demande des personnes transsexuelles.
Dans l’arrêt Rees, un transsexuel est passé du sexe féminin au sexe masculin. Ici, le requérant se plaignait que la législation britannique ne lui accordait pas un statut juridique correspondant à sa condition réelle. C’est pourquoi la Cour a conclu à la non-violation de l’article 8 de la Convention touchant au droit au respect de la vie privée et familiale. Les changements sollicités par Rees entraîneraient des modifications profondes dans le système d’état civil, ayant d’importantes conséquences administratives et sur le reste de la population ainsi que sur l’État de la législation du pays. De plus, la Cour a attaché du poids au fait que la Britannique avait collaboré au traitement médical du requérant.
Cependant, la Cour s’est dite consciente de la gravité des problèmes que peuvent rencontrer les transsexuels au regard de la progression de la science et de la société.
La Cour a conclu également à la non-violation de l’article 12 de la Convention relative au droit de se marier et de fonder une famille. Elle conclut que le concept traditionnel du mariage a pour base, une union entre personnes de sexes biologiques opposés. Les États ont en outre, le pouvoir de réglementer le droit de se marier. Et en l’état actuel de la législation anglaise, elle n’admet pas la reconnaissance de changement des actes de l’État civil. C’est à bon droit que les autorités administratives anglaises s’opposent à la délivrance de nouveaux actes au requérant.
C’est d’ailleurs cette solution identique que la Cour européenne des droits de l’homme a retenu dans l’arrêt Cossey Contre le Royaume-Uni rendu le 27 septembre 1990. Elle n’a pas relevé d’éléments nouveaux ou de circonstances particulières qui la permettraient de s’écarter de cet arrêt. Elle conclut que l’opération de conversion sexuelle n’entraîne pas l’acquisition de tous les caractères biologiques véritable du sexe opposé.
Par conséquent, une annotation dans le registre des naissances ne serait pas une solution appropriée. Néanmoins, bien que la Cour Européenne des Droits de l’Homme conclut à la non-violation des articles 8 et 12 de la CSDHLF dans l’arrêt Cossey, il faut dire que son dispositif n’est pas aussi distinct de l’arrêt Rees.
Il faut attendre le 25 mars 1992 pour que la Cour Européenne des Droits de l’Homme reconnaisse pour la première fois la violation de l’article 8 de la Convention CSDHLF notamment le droit à la vie privée et familiale à un transsexuel dans l’affaire B. c. France à travers la requête n° 13343/87. Selon les faits de l’espèce, transsexuelle passée du sexe masculin au sexe féminin, a porté à l’examen de la Cour CEDH le refus des autorités françaises de lui accorder la modification de son acte d’état civil qu’elle sollicitait en vain.
La position de la Cour se justifie par le fait que comparativement à la législation anglaise, la législation française reconnaisse la discordance de sexe dans ses lois. Cette position de la Cour ne va pas durer et n’est que profitable pour la requérante française. Puisque la Cour n’estime pas opportun de se raviser de sitôt en raison de la législation anglaise.
En effet, à travers deux (02) arrêts X, Y et Z c. Royaume-Uni suivant la requête n° 21830/93 rendu le 22 avril 1997 et l’arrêt Sheffield et Horsham c. Royaume-Uni en date du 30 juillet 1998, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a rejeté les demandes des requérants et a conclu à la non violation de l’article 8 de la convention CSDHLF. La Cour CEDH a conclu qu’il n’est pas nécessaire de s’écarter des arrêts Rees et Cossey.
C’est dans ces circonstances et contre toute attente, la Cour CEDH adopte l’arrêt Goodwin. C’est ainsi qu’à partir de l’arrêt Goodwin, la Cour Européenne des Droits de l’Homme fait un revirement de jurisprudence.
La novation de l’arrêt Goodwin constatant la violation des articles 8 et 12 de la Convention
La Cour européenne des droits de l’homme a adopté l’arrêt Goodwin à la surprise générale et malgré la législation interne anglaise qui lui constituant un blocage voire un motif pour conclure à la violation des articles 8 et 12 de la CSDHLF.
Selon les faits de l’espèce soumis à la Cour Européenne des Droits de l’Homme, la requérante C. Goodwin a porté des griefs contre la non-reconnaissance de son statut civil qui a changé par l’Etat anglais. Elle a indiqué clairement à la Cour la manière dont les services de l’Etat à savoir de l’emploi et de la sécurité sociale sont discriminatoires à son égard. Mieux, le refus de changement de son identité par les services de l’Etat civil a conclu à l’impossibilité de pouvoir se marier.
Dans l’arrêt Goodwin, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a conclu à la violation de l’article 8 de la convention concernant le droit au respect de la vie privée et familiale ainsi que l’article 12 de la même convention touchant au droit de se marier.
Elle reconnaît que le Royaume-Uni a violé les droits au respect de la vie privée et familiale et le droit de se marier de la requérante consacrés par la convention communautaire de l’Union Européenne.
Le revirement jurisprudentiel de la Cour dans l’arrêt Goodwin se justifie pour plusieurs raisons malgré l’existence d’une législation contraire à cette position. La tendance est de plus en plus la reconnaissance de certains droits à des personnes transsexuelles, c’est-à-dire des personnes ayant subi réellement la transformation sexuelle, dans presque toute l’Europe, mais aussi dans le monde en raison de l’acceptation de la société alors que la Royaume-Uni maintient le statu quo.
D’ailleurs, au point quatre-vingt-treize de l’arrêt Goodwin, la Cour CEDH le justifie par le fait, qu’il n’y a aucun facteur social d’intérêt général qui serait en conflit avec la demande de la requérante. Elle juge que le mieux est de balancer vers la tendance de la société de la reconnaissance des droits des transsexuels par souci d’équilibrisme.
En plus, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a reconnu également la violation de l’article 12 de la convention qui se rapporte au droit de se marier par l’Etat du Royaume-Uni. Elle estime la conception biologique comme critères de reconnaissance du sexe retenue par la Britannique ne tient plus. La définition du sexe doit évoluée afin de prendre en compte la situation des transsexuels.
Cette évolution aura pour corollaire la reconnaissance systématique du droit au mariage. Cette décision de la Cour vient consacrer la reconnaissance de la jurisprudence aux transsexuels au Royaume-Uni. L’Etat Anglais a dû affirmer sa position à celle de la Cour après cette décision.
C’est pourquoi la suite de l’arrêt rendu par la Cour dans l’affaire Christine Goodwin, La Britannique a instauré un mécanisme par lequel un transsexuel peut demander un certificat de reconnaissance de son sexe. Cette jurisprudence novatrice a fait un double revirement touchant le droit au respect de la vie privée et familiale ainsi que le droit de se marier. Elle protège les droits des transsexuels.
UNE ADMISSION D’UN DOUBLE REVIREMENT SUR LA RECONNAISSANCE DES DROITS AU PROFIT DES TRANSSEXUELS
La Cour européenne des droits de l’homme a procédé, à travers l’arrêt Goodwin, à un double revirement de jurisprudence au regard des personnes transsexuelles qui ont effectivement changé de sexe. Ainsi, ce revirement important touche fondamentalement le droit au respect de la vie privée et familiale ainsi que le droit de se marier en consacrés dans sa convention CSDH.
Le droit au respect de la vie privée et familiale des personnes transsexuelles
Le revirement opéré par la Cour CEDH de Strasbourg au regard du droit au respect de la vie privée des personnes transsexuelles est d’une importance particulière dans la mesure où le Royaume-Uni adoptait, jusqu’à lors, une position pour démontrer que les dispositions de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des Libertés fondamentales sont contraires à son ordre public interne. Le Royaume-Uni ne voit pas la nécessité de réformer au profit d’une minorité. Cette position fut changée l’arrêt Goodwin du 11 juillet 2002.
Désormais, l’Etat britannique ne peut plus arguer son ordre public interne pour refuser de reconnaître le droit de minorités transsexuelles. Il revient alors au Royaume-Uni de s’aligner sur la position de la Cour CEDH.
Cette position de la Cour de Strasbourg suscite une analyse. Selon la Cour, elle fonde sa décision sur une tendance d’autres juridictions du monde et sur les tendances populaires ou sociales de reconnaissance dans l’espace communautaire.
Mais cette tendance de reconnaissance basée sur le fondement et les considérations d’autres juridictions du monde en matière du droit de l’Homme au point de conduire à la métamorphose du droit interne des Etats-parties soulève des inquiétudes. Mais ces inquiétudes se dissipent en raison de la solution innovante pour une réalité sociale restée depuis sans solution, même si elle est empreinte d’un regard externe ou d’ailleurs.
La position de la Cour CEDH se justifie par l’évolution de la société et la tendance sociale de reconnaissance des personnes transsexuelles. C’est pourquoi elle voit la nécessité de leur consacrer des droits correspondants à leur statut social afin de ne pas créer des problèmes récurrents de société.
Elle rappela depuis l’arrêt Rees de 1986, elle attira l’attention des Etats membres de la nécessité de mettre en place un cadre légal de reconnaissance des minorités notamment transsexuelles. C’est la raison pour laquelle elle a censuré l’Etat défendeur. Mais, cette décision de la Cour CEDH a pour conséquence directe la reconnaissance du droit au mariage des personnes transsexuelles.
L’admission du droit de se marier au profit des personnes transsexuelles
L’arrêt Goodwin a censuré l’Etat défendeur concernant le droit de se marier des personnes transsexuelles. La Cour Européenne des Droits de l’Homme a opéré également au revirement de jurisprudence en conférant la possibilité à la personne transsexuelle de se marier à la personne de sexe opposé.
Depuis 1986 et dans l’arrêt Rees, la Cour Européenne des Droits de l’Homme attirait déjà l’attention des Etats membres d’opérer une réforme législative afin de reconnaître le droit au mariage au profit des personnes transsexuelles.
La Cour CEDH n’a pas manqué de rappeler que dans les affaires Rees, Cossey, et Sheffield et Horsham, l’impossibilité pour les requérants transsexuels d’épouser une personne du sexe opposé à leur nouveau sexe fut jugée non contraire à l’article 12 de la Convention. Cette conclusion procédait, suivant l’affaire, du raisonnement selon lequel le droit positif de se marier visait le mariage traditionnel dans sa nature entre deux personnes de sexe biologique différent.
Mais en 2002, l’arrêt Goodwin la Cour vient combler la largesse ou la négligence des Etats membres d’impulser une nouvelle ère. Elle a fait un revirement de jurisprudence par rapport à la conception traditionnelle du mariage qu’elle soutenait.
Dès lors, en réexaminant la situation en 2002 dans l’arrêt Goodwin, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a fait observer que par l’article 12 de la convention se trouve donc garanti par le droit fondamental, pour un homme et une femme, de se marier et en fondant une famille. Toutefois, selon la Cour, la conception d’enfant ou d’élever un enfant ne doit pas non plus être un élément décisif pouvant permettre d’accéder au droit au mariage des personnes transsexuelles.
L’exercice du droit de se marier emporte des implications sociales, personnelles et juridiques. Il se fonde sur les lois nationales des Etats contractants, mais les limitations initiées par chaque Etat ne doivent pas restreindre ou réduire ce droit. Il urge donc d’accorder le droit au mariage aux personnes transsexuelles.
Selon l’arrêt Goodwin, les considérations comme la non-concordance des caractères biologiques chez un transsexuel opéré ne peuvent plus constituer un motif suffisant pour justifier le rejet de reconnaître juridiquement le changement de sexe de l’intéressé.
Il faut désormais en tenir compte de nouveaux facteurs : la reconnaissance par la communauté médicale ou les autorités sanitaires dans les Etats contractants de la situation médicale de trouble de l’identité sexuelle, nécessite de traitements, y compris des opérations chirurgicales, censées permettre à la personne concernée de se rapprocher autant que possible du sexe auquel elle a le sentiment d’appartenir, et la reconnaissance par celle-ci du rôle social de son nouveau sexe.