Dès lors que l’un des faits constitutifs d’une infraction a été commis sur le territoire de la République française alors l’infraction est réputée commise sur ce territoire. C’est en ses termes que l’article 113-2 al 2 du Code pénal énonce la règle générale de l’application de la loi pénale dans l’espace.
Ainsi, en vertu d’un principe que l’on nomme le principe de territorialité, toutes les lois françaises doivent trouver à s’appliquer à partir du moment où une infraction a été commise sur le territoire français (en métropole comme pour tous les autres territoires).
Pourtant, de nombreuses questions peuvent rester en suspens pour les non-initiés. Qui a la compétence dans les cas où une infraction a été commise par un Français à l’étranger ? Quelle sera la loi à appliquer ? Également, si un étranger a été victime d’une infraction en France ou que l’infraction a été commise par ce dernier, quelles sont les lois applicables ?
Pour pouvoir répondre à ces problématiques et bien comprendre ce sujet, nous vous donnerons toutes les informations utiles dans cet article.
Dans un premier temps, nous allons analyser ce que c’est véritablement l’application de la loi pénale dans l’espace. Ensuite, nous poursuivons par des explications concernant les diverses exceptions et nous définirons le principe de territorialité. Enfin, nous étudierons les diverses compétences liées à l’application de la loi pénale dans l’espace.
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C’est quoi l’application de la loi pénale dans l’espace ?
De prime abord, il est impérieux de mentionner que la loi pénale française reste applicable aux infractions commises sur le territoire de la République. En droit français, selon l’article 2 du Code pénal, la loi pénale française régit les infractions commises dans la métropole, les DOM-TOM (les départements d’Outre-mer et les territoires d’Outre-mer), l’espace aérien se trouvant au-dessus de tous ces territoires et les eaux territoriales.
Tout cela découle en effet du fameux principe de territorialité, que l’on va développer dans les prochains paragraphes.
L’application de la loi pénale dans l’espace : Qu’est-ce que le principe de territorialité ?
Suivant le principe de territorialité de la loi pénale, la loi française est applicable dans tous les cas où l’infraction aurait été commise sur le territoire français. Ainsi, on ne prend pas en considération la nationalité de la victime ou de l’auteur de l’infraction. Cela est précisé à l’article 113-2 alinéa 1 du Code pénal. De même, la compétence territoriale est inconditionnelle, exclusive et générale.
Elle est générale du fait que la loi pénale s’applique aussi bien aux étrangers qu’aux Français dès lors qu’ils ont commis l’infraction sur le territoire de la République. En outre, son aspect inconditionnel tient du fait que le principe de réciprocité ne sera pas à appliquer.
Ainsi, il n’est pas requis que l’infraction soit également sanctionnée dans le droit étranger. Enfin, la compétence territoriale est exclusive, car en présence d’une infraction commise en France, le principe non ibis in idem sera écarté. Nul ne peut effectivement être jugé ni poursuivi deux fois à raison des mêmes faits. De ce fait, il est fort probable que la commission de l’infraction commise sur le territoire national soit jugée en France.
Quid de la notion du territoire de la République ?
Le territoire de la République englobe l’espace terrestre, l’espace maritime et l’espace aérien. L’espace terrestre concerne la France métropolitaine, les collectivités d’outre-mer et les collectivités territoriales à statut particulier. Quant à l’espace maritime, il intéresse la mer territoriale jusqu’à 12 mètres marins à partir de la côte. Pour l’espace aérien, il se voit comme une zone située au-dessus de la mer territoriale et l’espace terrestre.
Si le territoire de la République constitue l’un des éléments clés pour déterminer l’application de la loi pénale dans l’espace, des restrictions et des cas d’extensions sont à noter.
Pour l’espace maritime, par exemple, la restriction concerne l’infraction commise à bord ou à l’encontre d’un navire militaire étranger. En effet, les juridictions françaises dans ce cas n’auront pas de compétence territoriale. Pour le cas d’extension, il intéresse l’infraction commise en haute mer à l’encontre ou à bord d’un navire militaire français ou battant pavillon français. Certaines circonstances sont également prévues dans les conventions internationales et la loi.
Quant à l’espace aérien, le cas d’extension fait référence à l’infraction commise à l’encontre ou à bord d’un aéronef militaire français, d’un appareil qui atterrit en territoire français après la commission d’un délit ou d’un crime. Il vise également les locations d’appareils sans équipage faites par une personne résidant en France. Pour les restrictions, le domaine militaire porte exception à la compétence territoriale.
Dans la partie suivante, nous verrons comment déterminer l’application de la loi pénale dans l’espace en présence d’une infraction commise en France.
Quand est-ce qu’une infraction est réputée commise sur le territoire de la République pour l’application de la loi pénale dans l’espace ?
En matière d’application de la loi pénale dans l’espace, la première question que l’on peut se poser, c’est de savoir quand est-ce que l’on considère qu’une infraction est bien commise sur le territoire français ?
L’infraction est réputée commise sur le territoire français dans tous les cas où l’un des faits constitutifs a lieu sur le territoire. En droit commun, les éléments constitutifs englobent l’élément moral, l’élément matériel et l’élément légal. Les faits constitutifs concernent aussi les actes préparatoires à l’infraction, ses effets ainsi que les préjudices qu’elle cause.
Par ailleurs, une infraction est réputée commise sur le territoire de la République si l’un des éléments constitutifs a eu lieu en France. Cette idée est de mise notamment pour les infractions complexes.
Pour les infractions continues ou continuées, il faut que l’état délictueux continue en totalité ou en partie en France. Quant à une infraction d’habitude, cela requiert la constitution d’un seul élément constitutif en France.
Pour mieux comprendre les propos ci-dessus, nous allons prendre quelques exemples. Ainsi, pour une infraction commise à l’étranger, la loi pénale française s’applique si les actes préparatoires ont eu lieu en France.
De même, dans le cas d’une escroquerie, si la remise de la chose a eu lieu en France, ce sera la loi interne qui régira l’infraction.
En outre, en se référant au principe de territorialité, un délit d’initié commis sur un marché financier étranger par le biais des informations venant de France reste soumis à la loi pénale française.
Pour plus de détails sur l’application de la loi pénale dans l’espace, nous allons analyser les infractions commises à l’étranger.
Qu’en est- il des infractions commises à l’étranger face à l’application de la loi pénale dans l’espace ?
Comme nous venons de l’expliquer plus haut, le principe de territorialité prime lorsqu’on parle de l’application de la loi pénale dans l’espace. Toutefois, comme tout principe souffre d’exception, quelques notions sont à retenir.
Dans le cadre d’une infraction commise à l’étranger, la loi pénale française intervient en présence d’une complicité en France. Cette règle de droit français est invoquée à l’article 113-5 du Code pénal. Celui qui s’est rendu complice d’un crime ou d’un délit sur le territoire français est soumis à la loi pénale française. Pour ce faire, quelques conditions sont à examiner.
Parmi ces dernières, il est nécessaire que le crime ou le délit ait été également constaté par une décision définitive dans la juridiction étrangère. Il doit aussi être puni en même temps par la loi étrangère et la loi française. En matière de délit, il est nécessaire que ce comportement soit incriminé à l’étranger.
En outre, la nationalité française de l’auteur de l’infraction revêt une grande importance. En effet, la loi française s’applique d’une part aux délits commis par les Français à l’étranger si ces infractions sont aussi punies par la législation du pays.
Par ailleurs, les crimes commis par les Français à l’étranger sont régis par la loi française. Ces circonstances sont prévues à l’article 113-6 du Code pénal. En outre, si la victime possède une nationalité française, sachez que la loi française s’applique à tout crime et délit puni d’emprisonnement et commis à l’étranger.
En ce qui concerne la résidence de la victime, si cette dernière réside en France, la loi pénale française sera appliquée. Est réputé commis sur le territoire français, tout crime ou délit réalisé par le biais d’un réseau de communication électronique suivant l’article 113-9 du Code pénal.
Cela intéresse notamment les infractions commises sur Internet et qui deviennent de plus en plus fréquentes. La détermination de l’application de la loi pénale dans l’espace se fait en fonction de la nature de l’infraction. La loi française s’applique aux délits et crimes qualifiés d’atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation.
Il en est de même pour la contrefaçon et la falsification du sceau de l’État, des billets de banque, des effets publics ou encore des pièces de monnaie. De plus, les crimes ou délits faits commis à l’étranger contre les locaux ou les agents diplomatiques ou consulaires français sont régis par la loi française suivant l’article 113-10 du Code pénal.
Dans la quatrième partie de cet article, nous allons évoquer le cas des compétences personnelles passive et active pour l’application de la loi pénale dans l’espace.
Quelles sont les diverses compétences personnelles dans le cadre de l’application de la loi pénale dans l’espace ?
Les compétences personnelles qu’elles soient actives ou passives connaissent des conditions communes. Selon l’article 113-8 du Code pénal, les compétences personnelles s’appliquent en présence d’un crime ou d’un délit. Pour ce dernier, les poursuites sont engagées seulement si la victime dépose une plainte au préalable.
Il se peut également que les autorités étrangères procèdent à une dénonciation officielle et établissent ensuite une requête du Ministère Public. D’ailleurs, le principe du non-ibis in idem doit être pris en compte. De ce fait, la reconnaissance de l’autorité de la chose jugée à l’étranger reste de mise.
La compétence personnelle active : C’est quoi exactement ?
Concernant la compétence personnelle active, l’article 113-6 alinéa 1er du Code pénal dispose que : « La loi pénale française est applicable à tout crime commis par un Français hors du territoire de la République ». Pour cela, des conditions sont tenues d’être réunies.
Premièrement, il faut bien déterminer la qualité de Français au moment des poursuites. De même pour un délit, il est important de veiller à la réciprocité entre le pays de commission et la France. Comme nous l’avons dit un peu plus haut, cela tend à vérifier que le délit est également incriminé dans le pays en question.
Des extensions de la compétence personnelle active peuvent survenir dans le sens où l’exigence de réciprocité est écartée. Ainsi, les poursuites sont engagées à l’initiative du Parquet. Cette procédure concerne les agressions sexuelles prévues à l’article 222-22 alinéa 3 du Code pénal et les infractions sexuelles.
Par ailleurs, l’extension spéciale en matière de terrorisme relève également de la compétence française quand l’auteur réside habituellement sur le territoire français ou s’il est de nationalité française.
Tout savoir sur la compétence personnelle passive
Cette deuxième forme de compétence personnelle est précisée à l’article 113-7 du Code pénal stipulant que : « La loi française est applicable à tout crime, ainsi qu’à tout délit puni d’emprisonnement, commis par un Français ou par un étranger hors du territoire de la République quand la victime est de nationalité française au moment de l’infraction ».
Cet article annonce déjà les conditions nécessaires.
Ainsi, la qualité de français est prise en compte au moment même du fait. Si l’infraction est un délit, l’auteur de l’infraction doit être puni d’une peine d’emprisonnement. Il est également à noter que la compétence personnelle passive connait un cas d’extension. Il concerne notamment les cas d’une violence ayant causé la mort sans intention de la donner, de mutilation, une ITT (incapacité de travail temporaire) supérieure à 8 jours ou une infirmité permanente ou encore une violence qui a été commise avec une ou plusieurs circonstances aggravantes, à condition qu’il s’agisse d’une victime mineure résidant habituellement sur le territoire français.
Dans cette perspective, le Parquet peut agir seul. Ce qui différencie cette procédure de la procédure avec la compétence personnelle active, c’est la déposition de la plainte par la victime ou la dénonciation des autorités étrangères ne constituera pas des éléments requis.
Pour bien approfondir le sujet, d’autres notions comme la compétence réelle, la compétence universelle ou encore la compétence alternative à l’extradition sont à examiner tour à tour.
Quid de la compétence réelle, de la compétence alternative à l’extradition et de la compétence universelle dans l’application de la loi pénale dans l’espace ?
La compétence réelle touche essentiellement une série d’infractions énumérées à l’article 113-10 du Code pénal. Elle regroupe les infractions relatives à la préservation de l’intérêt national. On peut dire d’ailleurs que dans ce cas, il y a une compétence exclusive de la France.
De même, certains juristes et auteurs classent cette compétence comme une compétence personnelle passive du fait de la particularité de la victime qui n’est autre que l’État français. Quant à l’application de cet article, dans la pratique, cela n’est pas subordonné à des conditions spécifiques.
Ainsi, il n’est pas requis qu’il y ait une double incrimination, une application du principe non ibis in idem ou encore des exigences procédurales.
Concernant, l’article 113-8-1 du Code pénal maintenant, celui-ci prévoit la compétence alternative à l’extradition. Cette compétence alternative à l’extradition provient du fait que la loi pénale française s’applique à tout crime ou délit puni de 5 ans d’emprisonnement au minimum, à tout crime ou délit commis hors du territoire de la République par un étranger.
Dans la dernière circonstance, l’extradition ou la remise peut être refusée à l’État requérant par les autorités françaises ou l’organisation juridictionnelle française pour plusieurs motifs. Parmi ces motifs, il se peut que les faits pour lesquels l’extradition est demandée soient punis d’une mesure de sûreté contraire à l’ordre public ou d’une peine.
D’autres raisons comme la conséquence d’une gravité exceptionnelle sur l’individu concerné ou le non-respect des règles du procès équitable par les tribunaux de l’État requérant sont aussi envisageables. Pour ce qui est de la condition procédurale, les poursuites sont engagées à la requête du Ministère Public.
Enfin, les articles 689 et suivants du Code de Procédure pénale évoquent la compétence universelle. Dans l’article 689-11 du dit code, il est prévu que l’infraction ne doit pas relever de la compétence de la Cour Pénale Internationale.
Dans les cas où aucune des juridictions françaises ou internationales ne demande l’extradition de la personne concernée ou la remise, la requête du Ministère Public suffira pour engager les poursuites.
La suite dans un prochain article dédié à la compétence universelle … 😉