Le sursis à statuer est une décision émise par le juge de suspendre l’instance pour une durée déterminée jusqu’à la survenance d’un événement.
La définition du sursis à statuer
L’article 378 du Code de procédure civile définit le sursis à statuer comme la décision du juge de suspendre la procédure le temps de l’accomplissement d’une formalité ou de l’attente de l’écoulement d’un délai ou le prononcé d’un jugement. Il faut noter que cette formalité ou le jugement doit avoir un lien ou au moins une influence sur l’instance se déroulant devant le juge à l’origine du sursis à statuer.
Ainsi, le sursis à statuer est une mesure dite de sauvegarde. Celle-ci qui permet à l’autorité compétente sur déclaration préalable de différer sa décision. Ce sursis a pour effet principal d’interdire temporairement au pétitionnaire le droit de réaliser le projet pour lequel il a fait cette demande ou déclaration.
Les catégories de sursis à statuer
Il existe de nombreuses classifications des sursis à statuer. En effet, il se peut que le juge ait l’obligation de surseoir dans certains cas. Dans d’autres en revanche, surseoir est une simple faculté.
- Le sursis à statuer obligatoire
La loi impose au juge de surseoir à statuer dans certaines situations. Par exemple, l’article 108 du CPC prévoit une obligation pour le juge de suspendre l’instance si une partie invoque un délai pour faire un inventaire et délibérer. Il en va de même en matière de sûretés pour demander le bénéfice de discussion ou de division entre les cautions.
- Le sursis à statuer facultatif
Le juge peut aussi choisir de surseoir à statuer dans le cas où il voudrait accorder un délai au défendeur pour faire intervenir un garant ou dans le cas où il existe un litige parallèle devant les juridictions pénales (le criminel tient le civil en l’état). Il se peut aussi qu’une partie invoque une décision de pourvoi en cassation ou de toutes autres voies de recours extraordinaires comme la tierce opposition.
Les caractéristiques du sursis à statuer ou la nature du sursis à statuer
Le sursis à statuer a fait l’objet de plusieurs qualifications par la doctrine et la jurisprudence. En effet, on peut se demander s’il s’agit d’un incident d’instance ou d’une exception de procédure. L’intérêt de cette distinction est de connaître le régime juridique applicable.
D’un côté, l’incident d’instance est régie par les articles 378 et suivant du CPC. Étant un incident d’instance ne mettant pas fin à l’instance, la demande de sursis à statuer peut être introduite pour la première fois devant une juridiction de jugement. Par ailleurs, un appel peut être dirigé contre la décision statuant sur le sursis à statuer et sur autorisation du premier président de la cour d’appel.
De l’autre côté, les exceptions de procédure sont régies par le chapitre II du Titre V du CPC concernant les moyens de défense des parties. Ainsi, seul le juge de la mise en état est compétent pour connaître du sursis à statuer comme toute exception.
De ce fait, toute demande de sursis à statuer doit être soulevée devant lui in limine litis, cela comme l’exige l’article 74 du CPC. Après l’ouverture des débats, une demande de sursis à statuer est irrecevable devant la formation de jugement.
Les causes du sursis à statuer du juge
Le juge sursoit à statuer dans le but de veiller au bon déroulement de l’instance. Il s’agit là de son rôle de gestionnaire d’instance. Les différentes causes du sursis à statuer sont prévues par la loi.
Le bénéfice de discussion ou de division
Le sursis à statuer peut être demandé par la caution pour qu’il jouisse du bénéfice de discussion ou de division dans un cautionnement solidaire (découvrez aussi ce que c’est un contrat de cautionnement). Le bénéfice de discussion permet à la caution d’exiger que le créancier saisisse et fasse vendre d’abord les biens du débiteur avant de l’actionner en paiement. Le bénéfice de division par contre, lui permet de contraindre le créancier à diviser son recours entre les cautions appelées cofidéjusseurs.
Le délai d’appel à un garant
Selon l’article 109 du CPC, le défendeur peut demander au juge de surseoir à statuer pour pouvoir appeler un garant. En effet, il peut demander la mise en œuvre d’une garantie simple ou formelle. Il lui faut ainsi du temps pour appeler à la cause le garant.
La formulation d’une question préjudicielle
Le sursis à statuer est obligatoire dans le cas où la juridiction judiciaire doit céder la compétence à la juridiction administrative, car une question relève plus de sa compétence tout en présentant une difficulté sérieuse. Ce n’est qu’une fois la question résolue que la juridiction judiciaire redevient compétente.
La formulation d’une question prioritaire de constitutionnalité
Lorsqu’une disposition de la loi est invoquée devant toute juridiction et que l’une des parties soutient qu’elle est anticonstitutionnelle, car elle porte atteinte aux droits et libertés prévues par la Constitution, la Cour de cassation ou le Conseil d’État peut saisir le Conseil constitutionnel pour se prononcer dans un délai déterminé. Il s’agit d’un contrôle de constitutionnalité.
La juridiction initialement saisie doit ainsi surseoir à statuer sur le fond de l’affaire et attendre la décision du Conseil constitutionnel.
Le criminel tient le civil en l’état
Le sursis à statuer est ici d’origine jurisprudentielle. En effet, lorsque l’action civile et l’action publique sont exercées en même temps pour les mêmes faits, le juge de la juridiction civile doit surseoir à statuer pour attendre une condamnation pénale avant d’accorder une réparation. Il s’agit ici de la manifestation de la primauté de la décision pénale et du respect de la présomption d’innocence.
Les conséquences du sursis à statuer
Le sursis à statuer ne signifie pas que le juge n’est plus compétent pour connaître de l’affaire. Le sursis à statuer suspend le cours de l’instance qui peut être poursuivie à son expiration, c’est-à-dire à la survenance d’un événement. La suspension dépend en effet soit de la volonté du juge qui a fixé préalablement un délai soit de la survenance d’un événement déterminé par le juge lui-même. Cette durée peut être prorogée ou abrégée par le juge selon son appréciation (article 379 du code de procédure civile).
La poursuite de la procédure peut être demandée par les parties ou est à l’initiative du juge seul sans formalité.
Le recours contre le sursis à statuer
La décision de sursis peut faire l’objet d’un appel dans un délai d’un mois après la décision de sursis à statuer. Il faut néanmoins, une autorisation du premier président de la cour d’appel est saisie par assignation. Il faut en outre que cet appel soit basé sur un motif grave et légitime (article 380 du CPC).
Le premier président est saisi par l’appelant et il statue en référé, donc dans la forme accélérée. Sa décision n’est plus susceptible de pourvoi en cassation.
De plus, la décision de sursis rendue en dernier ressort peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation sur la base d’une violation de la règle de droit.