Qu’est-ce qu’un lien de subordination ?

Lien de subordination

Le lien de subordination constitue en droit du travail l’un des éléments fondamentaux et constitutifs du contrat de travail. Le lien de subordination qui fait partie intégrante du contrat de travail avec la rémunération et la fourniture du travail, implique pour le salarié de suivre les instructions de son employeur pour la réalisation des différentes tâches qui lui sont confiées afin d’atteindre des objectifs fixés par l’employeur.

En effet, conformément au schéma ci-dessous, il existe trois éléments essentiels qui caractérisent tout travailleur qui a la qualité de salarié.

En réalité, à côté du contrat de travail et de la rémunération acquise au travailleur en contrepartie du travail réalisé, c’est le lien de subordination qui représente le critère décisif dans la relation de travail.

D’ailleurs, c’est grâce au lien de subordination qu’il est possible de faire la différence entre le travailleur salarié et le travailleur indépendant. Ceci se comprend en ce sens que l’exécution du travail chez le travailleur indépendant ne requiert pas que celui-ci soit soumis à un quelconque lien de subordination vis-à-vis de l’employeur.

Dans cet article, nous allons traiter du lien de subordination dans le contrat de travail. Deux axes principaux seront développés dans l’article. Tout d’abord, nous ferons une présentation générale du lien de subordination. Ensuite, nous verrons son application concrète telle que définie par le Code du travail.

Présentation du lien de subordination

Pour procéder à l’analyse détaillée de l’article 1102 du Code civil, nous nous pencherons sur les questions concernant le fond et la forme de cet article.

Lien de subordination : Définition

Définition

La définition du lien de subordination a été délivrée par l’arrêt n° 94-13 de la chambre sociale de la Cour de cassation.

En résumé, on peut retenir que le lien de subordination nécessite un contrat de travail et se réfère à l’exigence pour tout subordonné de respecter les instructions de son employeur ainsi que de s’y conformer dans le cadre de la réalisation du travail qu’il lui a confié.

Commentaire sur la définition du lien de subordination

Lorsqu’on analyse la définition susmentionnée du lien de subordination, il en ressort que l’autorité de l’employeur est caractérisée par trois types de pouvoir.

En effet, l’employeur en raison de l’existence d’un contrat de travail et d’un lien de subordination a la faculté de donner des ordres au travailleur. Il s’agit de directives devant permettre au salarié de bien exécuter ses obligations contractuelles.

Par ailleurs, toujours en raison du rapport de subordination, l’employeur peut opérer des contrôles, soit par lui-même, soit par le biais d’une autre personne engagée pour le faire. Les contrôles concernent évidemment le respect des directives données et la soumission du salarié au règlement intérieur du lieu de travail.

Enfin, une fois que l’employeur a contrôlé l’exécution des tâches de son salarié et qu’il lui apparaît que celui-ci n’a pas respecté ses obligations contractuelles, il a la possibilité de sanctionner les manquements du salarié. Par manquements, il faut entendre ici toute désobéissance ou non-respect des règles de l’entreprise, l’insubordination du salarié, etc.

Lien de subordination et contrat de travail

Relation d’interdépendance entre lien de subordination et contrat de travail

Toute activité salariée n’induit pas de facto un lien de subordination. En réalité, celui-ci sert à caractériser principalement le contrat de travail. Autrement dit, c’est principalement dans un contrat de travail qu’il s’agisse d’un contrat à durée déterminée ou à durée indéterminée que l’on retrouve le lien de subordination.

Cependant, commençons par préciser ici qu’il n’est pas possible de soumettre un salarié à un lien de subordination. Celui-ci doit avoir manifesté son accord personnel, par le biais d’une signature qu’il a apposée au contrat de travail ou à travers un comportement sans équivoque.

Dans le cas où un doute subsisterait, le régime juridique découlant du lien de subordination ne peut être appliqué à la relation contractuelle. Quels que soient les cas, tout employé, même lorsqu’il a approuvé le lien de subordination peut s’en délier à tout moment. Il lui suffit pour ce faire de démissionner de son emploi pour que cesse le lien de subordination.

Distinction contrat de travail et contrat de prestation de service

Pour établir la distinction entre le contrat de travail et le contrat d’entreprise par exemple, il faut se baser sur le lien de subordination. Ici, le contrat d’entreprise est une terminologie différente pour désigner le contrat de prestations de service.

En réalité, sans le lien de subordination, le contrat d’entreprise peut facilement être assimilable au contrat de travail. Les deux contiennent une obligation de prestation de travail en contrepartie d’une rémunération. Dans le premier cas, la rémunération se confond au salaire, dans le second cas, il s’agit du montant de la valeur de la prestation de service.

La différence essentielle intervient dès qu’on aborde la situation de subordination. Du côté du contrat de prestation de service, le prestataire conserve son indépendance et n’est tenu à aucune obligation de soumission vis-à-vis du client.

En outre, il dispose d’une certaine forme de liberté dans l’organisation de son travail alors que le salarié doit exécuter les directives de son employeur, sous peine de sanction.

Par ailleurs, le prestataire peut à tout moment travailler avec plusieurs clients alors qu’au niveau du travail salarié, l’employé réserve l’exclusivité de son temps de travail et de son activité professionnelle à son employeur.

Une autre différence essentielle concerne par exemple les obligations de l’employeur vis-à-vis du travailleur quant à la déclaration et au paiement des charges sociales.

Dans un contrat de prestation de service, il ne pèse pas sur le client une obligation de protection sociale vis-à-vis du prestataire de service : dès que celui-ci a fourni le service requis, ses honoraires ou le tarif de sa prestation sont réglés et le contrat prend fin. Ainsi pour résumer, l’employeur est redevable aux organismes de recouvrement des charges sociales alors que le client ne l’est pas.

On peut également faire cas du droit aux congés dont dispose le salarié en vertu du lien de subordination qui le lie à son employeur. Dans un travail indépendant, le prestataire ne peut demander de pareils avantages tout simplement parce qu’il n’existe aucun lien de subordination entre lui et le client.

Plusieurs autres exemples permettent de dire en quoi le lien de subordination est propre au contrat de travail et en quoi il le différencie des autres conventions. Toutefois, une question se pose : que se passe-t-il lorsqu’un lien de subordination, qui était de nature à caractériser l’existence d’un contrat de travail, se retrouve dans un contrat de prestation de service ?

Le cas du contrat de prestation de service

Si dans les conditions d’exécution d’un contrat de freelance (il s’agit d’une autre dénomination du contrat de prestation de service), il est constaté l’existence d’un rapport de subordination, le juge pourra procéder à la requalification dudit contrat en contrat à durée indéterminée (CDI).

Cette nouvelle analyse sur la qualification juridique du contrat génère d’importantes conséquences à l’encontre du client. C’est fort de cela que plusieurs recours ont été portés vers le conseil de prud’hommes en vue de les conduire à une requalification du contrat de prestation de service en contrat de travail.

Ainsi, un lien de subordination reconnu dans un contrat de prestation de service transforme celui-ci en contrat à durée indéterminée avec toutes les implications juridiques qui en découlent comme nous l’avons précisé un peu plus haut dans cet article.

En effet, ce sera le régime général applicable à un contrat à durée indéterminée qui sera applicable à partir du moment où le lien de subordination a été constaté.

Tout d’abord, si c’est le client qui prend l’initiative de rompre un tel contrat requalifié, ce sera comme s’il avait procédé à un licenciement. Très souvent, c’est après la rupture de la relation contractuelle que l’affaire est portée devant la juridiction sociale.

Ainsi, le juge social conclura que le licenciement du prestataire, ayant acquis un statut de salarié après requalification, était sans cause réelle et sérieuse. Il s’ensuivra donc pour le client, ayant acquis le statut d’employeur après la requalification de verser des dommages et intérêts à son prestataire.

Enfin, il est important de préciser qu’il existe quelques possibilités qui sont compatibles avec l’exercice d’un emploi indépendant. Toujours en considérant le contrat de prestation de service, l’obligation contractuelle visant pour le sous-traitant à une reddition de compte n’est pas suffisante pour emporter un contrat de travail.

Il faudra d’abord que cette obligation soit au-delà du devoir normal de tout mandataire de rendre des comptes de gestion à son mandant. C’est ce qu’indique la jurisprudence rendue par la Cour de cassation en date du 26 novembre 1981.

Le cas du lien de subordination dans un contrat bénévole

Pour le législateur, il n’est pas possible de travailler en subordination alors qu’on effectue un travail assimilable à du bénévolat. Autrement dit, le droit français ne reconnaît le lien de subordination que dans un emploi exercé moyennant une rémunération pour le travail réalisé.

On peut se demander aussi s’il est possible de faire un cumul de fonctions entre une activité comportant plusieurs liens de subordination. La question est délicate, puisqu’il est aujourd’hui possible d’exercer plusieurs emplois tant que les horaires ne coïncident pas entre eux.

Toutefois, il revient au juge d’évaluer au cas par cas, par exemple s’il existe une affiliation entre les deux emplois, si l’un des deux emplois est du bénévolat, etc.

Lien de subordination : Code du travail

Absence de définition dans le code de travail

À la lecture du Code du travail, il apparaît qu’on n’y retrouve pas une définition du lien de subordination. C’est d’ailleurs pour pallier ce vide laissé par le Code du travail concernant la définition du lien de subordination qu’on a dû recourir à la jurisprudence.

En la matière, notre intérêt s’est porté sur l’arrêt n°9413187 rendu par la chambre sociale cour de cassation en date du 13 novembre 1996.

Ce qu’il faut retenir de cette jurisprudence c’est que l’existence d’un lien de subordination ne dépend pas de la volonté exprimée par les parties dans le contrat. C’est plutôt, sur la base d’un faisceau d’indices que le lien de subordination est appréhendé. Toutefois, il n’est pas interdit aux parties d’insérer dans le contrat des clauses rappelant l’existence d’un lien de subordination juridique.

Relativité du lien de subordination

Il est important de préciser que malgré les divers critères retenus pour caractériser le lien de subordination, celui-ci varie selon les professions et les domaines d’activité. On en déduit que la notion de lien de subordination n’est pas une notion figée, elle est relative à l’activité professionnelle.

Dans la réalité, certaines professions, malgré qu’elles soient exercées sous subordination, sont caractérisées par un certain niveau d’autonomie et de liberté d’initiative. Dans ce cadre, certaines fonctions comme celle d’un ancien Directeur général/Président de SA, toujours en activité dans l’entreprise sont caractérisées par le lien de subordination, mais en bénéficiant d’une liberté d’action et d’une marge de manœuvre élargie.

Cependant, ceci ne signifie pas que la société ne dispose plus du pouvoir de direction ou du pouvoir de sanction contre les agents bénéficiant de ce statut souple. En cas d’insubordination, ils pourraient écoper de la même sanction qu’un simple collaborateur ou employé de la société.

Le faisceau d’indices relatif au lien de subordination

Certains agissements, devoirs, comportements constituent des indices indiquant non seulement l’existence d’une relation de travail entre les parties, mais aussi un lien de subordination entre elles, de telle sorte que l’on distingue qu’une partie dispose d’un certain pouvoir sur l’autre. Quelques exemples permettront d’illustrer le concept du faisceau d’indices.

  • Un programme établi par l’entreprise

L’assujettissement du salarié à un emploi du temps unilatéralement défini par son employeur constitue un indice fort d’un lien de subordination entre les deux parties. Dans ce cadre, l’employeur dispose de la faculté de sanctionner le salarié si celui-ci ne respecte pas l’horaire/l’agenda retenu pour son travail.

  • Des traits d’appartenance à la société

Lorsque le salarié reçoit certains effets ou objets à l’effigie de l’entreprise (carte de visite, adresse mail, etc.), on peut déduire de ces éléments qu’il existe un lien de subordination entre lui et l’employeur.

De la même manière, dans le cas où le matériel dont il aura besoin pour fonctionner lui est remis par l’entreprise, la même déduction pourra être faite. Ces traits d’appartenance à la société sont désignés encore par le terme d’« intégration à un service organisé ».

Les implications juridiques du lien de subordination

Le lien de subordination du côté de l’employeur

À travers le lien de subordination, l’employeur acquiert une position d’autorité vis-à-vis du salarié envers qui il se positionne en tant que donneur d’ordre. À cet effet, l’employeur pourra :

  • Obliger le salarié au respect d’un horaire

En tant que donneur d’ordre, l’employeur peut soumettre le salarié au respect d’un emploi du temps et d’un horaire préétabli. Il s’agit là d’un indicateur de lien de subordination.

  • Obliger le salarié à exercer dans un champ géographique précis

Le fait pour un chef d’entreprise d’imposer à un salarié de travailler dans un lieu donné : bureaux, usine, etc. constituent un indicatif de lien de subordination dans la relation qui les lie entre eux.

  • Obliger le salarié à respecter un code de conduite

De la même manière, le fait pour le chef d’entreprise de soumettre l’employé au respect d’un code de conduite ou d’un règlement intérieur constitue une autre marque démontrant un lien de subordination.

  • Soumettre l’employé à un code professionnel

Lorsque l’employeur met en place un code professionnel (port de tenue vestimentaire, changement de conditions de travail, exigence de certaines valeurs, etc.), il s’agit aussi d’un faisceau d’indices qui laisse supposer un lien de subordination entre le salarié et lui.

En vertu de cette position d’autorité dont il dispose, l’employeur peut prononcer une sanction disciplinaire contre le salarié qui n’aura pas respecté les règles et commandements imposés.

Ces sanctions sont de diverses formes et peuvent courir d’un simple blâme à un renvoi définitif de l’entreprise en cas de faute lourde par exemple. Toutefois, il est impérieux qu’une procédure disciplinaire bien précise soit établie avant le renvoi du salarié, au risque pour l’employeur de se retrouver dans un cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le lien de subordination du côté de l’employé

Comme précisé ci-dessus, le lien de subordination soumet le salarié au respect des normes et règles éditées par son employeur pour le bon fonctionnement de l’activité. L’employé a également un devoir de non-concurrence vis-à-vis de son employeur.

D’ailleurs, il doit l’exclusivité de son activité professionnelle à son employeur et ne devrait pas travailler pour un autre employeur en même temps et encore moins dans le même secteur d’activité.

Toutefois, le salarié bénéficie de certains droits et avantages que lui garantissent non seulement son contrat de travail, mais également la convention collective régissant son domaine d’activité.

Certains de ces droits sont liés à sa personne (respect de la vie privée, maintien d’un cadre sécurisé et sain pour son activité, etc.), d’autres sont liés à son activité professionnelle (droit au salaire, aux congés payés, à la désignation de représentant du personnel, etc.).

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