C’est quoi l’erreur manifeste d’appréciation ?

Erreur manifeste d’appréciation

L’erreur manifeste d’appréciation correspond à l’élément que le juge considère pour contrôler une décision prise par l’Administration. Cela fait référence à une erreur flagrante, manifestement grossière, d’une évidence telle qu’elle est décelable par le bon sens et qui pourrait entraîner une solution inconvenante dans l’appréciation des faits par l’autorité administrative. Il y a erreur manifeste lorsqu’il y a disproportion entre les faits d’espèce et la décision rendue.

Nous allons vous expliquer ci-dessous la définition complète de l’erreur manifeste d’appréciation, vous saurez tout 🙂

Qu’est-ce que l’erreur manifeste de droit ?

Selon une formule jurisprudentielle courante, l’erreur manifeste de droit est : dans les hypothèses où « l’autorité administrative compétente exerce en opportunité » ses attributions (compétence discrétionnaire), et, en fait, dans celles où le juge ne se sent pas apte à exercer un contrôle poussé, « la décision qu’elle prend ne doit pas reposer sur des faits matériellement inexacts, sur une erreur de droit, sur une erreur manifeste d’appréciation ou être entachée de détournement de pouvoir ». Le contrôle du juge est ainsi qualifié de « restreint » en ce sens qu’il ne s’étend pas au contrôle de la qualification juridique des faits.

En revanche, dans les autres hypothèses, en particulier celles où l’administration dispose d’une compétence liée, la décision administrative fait l’objet d’un « contrôle normal » de la part du juge, ainsi élargi au contrôle basé sur la qualification juridique des faits.

Cette différence ne doit toutefois pas être excessive, car en réalité il n’y a qu’une différence de degré :

  • En cas de contrôle normal :

Le juge vérifie que l’acte contesté est en rapport exact avec les faits de nature à le justifier juridiquement (Voir : Différence entre un acte juridique et un fait juridique);

  • En cas de contrôle restreint, accompagné du contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation :

Le juge vérifie qu’il n’y a pas une disproportion manifeste, excessive, déraisonnable entre l’acte et les faits qui l’ont provoqué. Dans cette seconde hypothèse, il s’agit d’un contrôle de la qualification juridique, mais d’un contrôle restreint, en ce sens que « censurer une décision pour cause d’erreur manifeste d’appréciation, c’est la censurer parce que, manifestement, les faits ne sont pas de nature à la justifier juridiquement ».

Commet ainsi une erreur manifeste d’appréciation le ministre de l’Intérieur qui refuse d’abroger un arrêté d’expulsion pris le 11 décembre 1975 et mis à exécution le 12 décembre 1985, eu égard aux faits de l’espèce.

Le Conseil d’État relève qu’au cours des six années ayant précédé la décision implicite attaquée l’étranger s’est seulement rendu coupable de deux délits mineurs ayant entraîné sa condamnation à des peines d’amende : « en estimant que sa présence sur le territoire français constituait une menace grave pour l’ordre public, le Ministre a entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation » (CE, 17 MAI 1991 Boulaajaj).

Il est à préciser que les juridictions administratives se basent « sur une appréciation d’ensemble et par une vérification plus rigoureuse et plus concrète des éléments de fait », sur lesquels devraient se fonder les auteurs du plan (litige en urbanisme), complétées le cas échéant par une visite des lieux (CE, 19 oct. 1979 Association pour la sauvegarde du Pays de Rhuys).

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Quels sont les cas d’ouverture du recours pour excès de pouvoir ?

Les cas d’ouverture du recours pour excès de pouvoir présentent des particularités :

  • Le recours pour un excès de pouvoir :

Il s’agit d’un recours contre une décision administrative ; on dit que le recours pour excès de pouvoir est le procès fait à un acte dans lequel l’administration a commis une erreur, il s’agit d’un contentieux objectif, qui va permettre de faire apprécier au juge la seule légalité de l’acte ;

  • Il s’agit d’un recours juridictionnel :

Il est possible (parfois obligatoire) d’exercer, avant de saisir le juge, un recours gracieux ou hiérarchique auprès de l’administration ; la tendance est à la multiplication des recours administratifs préalables. Tel est le cas, par exemple, en matière de communication de documents administratifs ; un recours préalable obligatoire doit être effectué auprès de la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA). Mais cette obligation n’existe pas toujours et l’administré peut saisir le juge directement dans de nombreux cas ;

  • c’est un recours juridictionnel de droit commun :

Il existe un principe général du droit selon lequel tout acte est susceptible d’un recours en annulation (CE, 17 février 1950, Dame Lamotte) le recours pour excès de pouvoir est toujours possible contre une décision administrative, même si aucun texte ne le prévoit. C’est un recours d’ordre public ;

  • C’est un recours qui aboutit en principe à l’annulation de la décision par le juge ;

Cette annulation est rétroactive, mais le juge s’est reconnu le pouvoir de moduler les effets dans le temps de sa décision d’annulation.

Les conditions de recevabilité sont essentiellement au nombre de trois :

  • Le requérant doit d’abord démontrer un intérêt à agir :

En d’autres termes, sa situation doit lui permettre d’intenter légitimement un recours pour excès de pouvoir ;

  • L’acte attaqué :

Il doit contenir les caractéristiques d’une décision administrative, l’acte doit faire grief

  • Enfin, le requérant devra exercer à l’intérieur d’un certain délai ce recours ;

Si le délai est expiré, la décision ne peut plus faire l’objet d’un contrôle par voie d’action, directement devant le juge.

  • Une quatrième condition existe, mais elle est de moins en moins utilisée :

Il s’agit de l’absence de recours parallèle ; cela signifie que, pour saisir valablement le juge de la légalité d’une décision, il ne faut pas qu’existe, en parallèle, une autre voie contentieuse qui permettrait au requérant d’obtenir la même satisfaction que celle que lui donnerait un recours pour excès de pouvoir.

Si l’une des conditions requises fait défaut, le juge rejettera la requête comme étant irrecevable.

Les cas d’ouverture ou moyens d’annulation se divisent en deux catégories les moyens de légalité externe et les moyens de la légalité interne.

Les moyens de légalité externe soulèvent des illégalités qui affectent la manière dont la décision a été prise, les vices qui ont pu affecter le processus d’édiction de la décision. Ils tiennent à l’incompétence (la personne qui a édicté l’acte n’était pas compétente pour le faire) et au vice de forme ou de procédure (la décision a été édictée sans respect d’un certain nombre de formalités ou sans respecter un processus consultatif). Seul le premier moyen (l’incompétence) est d’ordre public. Le second a fait l’objet de précisions de la part du juge et ne conduit pas systématiquement à l’annulation de la décision administrative.

Les moyens de légalité interne, quant à eux, soulèvent des illégalités tenant au contenu de l’acte. Ces illégalités internes se divisent en deux catégories, dont l’une s’est énormément diversifiée.

Le détournement de pouvoir met en évidence le fait que l’autorité administrative a utilisé les pouvoirs dont elle disposait dans un but autre que celui pour lequel ils lui avaient été conférés, le juge préférant annuler un acte sur un autre fondement que celui-ci, dans la mesure où ce vice souligne une certaine mauvaise foi de l’administration, ou une absence de moralité administrative.

La violation de la loi implique que les motifs de la décision administrative sont non fondés (erreur de fait) ou illégaux (erreur de droit).

Erreur manifeste d’appréciation : Qu’est-ce que l’erreur de droit ?

En droit administratif, l’erreur de droit est l’hypothèse de l’administration qui dispose d’un pouvoir qu’elle détourne sciemment ou non. L’erreur de droit fait le plus souvent l’objet du contrôle du juge administratif et peut être associée à des causes différentes. C’est lorsque l’autorité administrative a utilisé ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés. Il faut donc que le juge recherche l’intention de l’auteur de l’acte, ses mobiles, ce que Hauriou appelait « la moralité administrative ».

L’autorité administrative a pu agir dans un but complètement étranger à l’intérêt public ;

  • Elle le fait de manière négative, dans un but purement personnel :

Un maire utilise ses pouvoirs de police pour restreindre les jours d’ouverture d’un dancing parce que cet établissement risque de lui faire concurrence, lui-même étant propriétaire d’un établissement de ce type (CE, 14 mars 1934, Demoiselle) ; une autorité procède à la révocation d’un fonctionnaire pour des considérations totalement étrangères à l’intérêt public ; la décision de ne pas sélectionner un haltérophile pour une compétition internationale a été prise à seule fin d’infliger une sanction à l’intéressé à la suite de ses déclarations publiques sur le comportement d’un dirigeant de la fédération (CE, 25 mai 1998, Fédération française d’haltérophilie) ;

  • Mais l’autorité administrative peut agir de manière positive, pour avantager quelqu’un :

Ex : Une autorité administrative réussit à faire créer un emploi de directrice d’une école de tapis à Djibouti uniquement pour assurer un travail à la personne qu’elle protège (CE, 5 mars 1954, Demoiselle Soulier). Il en est de même du décret modifiant, sur proposition du ministre, le statut du corps d’inspecteurs pour rendre possible la nomination du chef de cabinet de ce ministre dans le corps en question (CE, 13 janvier 1995).

Hormis l’hypothèse de l’erreur de droit (erreur manifeste d’appréciation) due à un détournement de pouvoir, il y a également le cas où l’administration a mis en œuvre une norme inexistante ou inapplicable. C’est l’exemple d’un décret résiliant le contrat de concession d’une chaîne de télévision privée fondée sur un projet de loi non encore adopté et qui est entaché d’une erreur de droit (CE 2 février 1987)

Il est à noter également l’erreur de droit qui se produit lorsque l’administration a pris une décision, conformément à des normes juridiques qui sont illégales en raison de leur non-conformité avec une norme supérieure.

À cet effet, est contraire au droit un arrêté qui reconduit à la frontière un étranger en situation irrégulière pris sur le fondement d’une décision elle-même illégale refusant à la requérante la délivrance d’un certificat de résidence (CE 10 Novembre 1997 Gherbi).

Erreur manifeste d’appréciation : Qu’est-ce qu’un contrôle d’opportunité ?

Le contrôle d’opportunité : l’administration est soumise au respect des décisions prises par les acteurs politiques, eux-mêmes contraints de respecter des règles juridiques posées préalablement à leurs actions selon le principe très classique de la hiérarchie des normes, sous le contrôle attentif du juge administratif, lui-même soumis au respect de la séparation des pouvoirs.

Le juge doit respecter, dans l’étendue du contrôle d’opportunité, les prises de décisions des gestionnaires publics dès lors que ces dernières sont conformes à la légalité et il n’a donc pas à effectuer un contrôle d’opportunité. L’affirmation apparaît comme l’un des grands principes du droit administratif.

Le contrôle d’opportunité désignerait alors le pouvoir de vérifier que l’administration a su se saisir de l’ensemble des occasions favorables qui lui étaient offertes, au regard de ses fins. Si c’est d’évidence au premier sens du terme que se réfère implicitement la doctrine quand elle évoque le contrôle d’opportunité, la deuxième acception proposée ici ouvre des perspectives non négligeables de compréhension du contrôle d’opportunité.

Traditionnellement la doctrine en sciences administratives distingue, outre le contrôle d’opportunité, quatre types de contrôles : le contrôle de légalité, le contrôle de conformité et le contrôle de gestion. Le contrôle de légalité, tends à contrôler le respect par l’administration des normes législatives et réglementaires qui lui sont applicables.

(Lire aussi pour plus de détails : Comment la pyramide des normes de Kelsen est-elle interprétée par la jurisprudence ?)

Le contrôle de conformité vise à contrôler le respect par l’administration de normes en vue de minimiser au maximum la violation du droit et le contrôle de gestion est un contrôle des écarts entre les résultats obtenus et les résultats attendus, fondé sur une réflexion stratégique quant à la performance de l’action administrative.

En situation de compétence liée, la question du contrôle d’opportunité ne se pose pas, l’administration étant par définition tenue à un type d’acte ou de solution donnés en fonction du contexte. En matière de compétence liée, le juge ne se livre pas à un contrôle d’opportunité. Dans l’hypothèse, par exemple, où l’administration doit juridiquement prendre une décision positive, le juge, en accomplissant l’acte obligatoire à sa place, se contente de pallier une carence administrative dans le strict cadre du seul contrôle de légalité.

En revanche, la question du contrôle d’opportunité est soulevée dans les cas où l’administration est à même d’exercer un pouvoir discrétionnaire. Toutefois, dans le cas l’erreur manifeste d’appréciation, il n’est pas reconnu au juge de pouvoir apprécier l’opportunité administrative des choix de cette dernière dans la mise en œuvre de son pouvoir discrétionnaire, en jugeant si, entre les différentes solutions également légales qui lui étaient offertes, l’administration a pris la plus adaptée aux circonstances.

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