La dation en paiement a été introduite par André Malraux dans la loi n° 68-1251 du 31 décembre 1968 que l’on appelle aussi la « Loi Malraux ». Ce mode de paiement est un mode d’extinction d’une obligation par la remise d’une chose en lieu et place de ce qui a été initialement prévu. On retrouve la dation en paiement de manière fréquente en matière fiscale et successorale, mais aussi en matière foncière. Son régime est prévu par le Code général des impôts (CGI) en ses articles 1716 bis, 1723 ter 00 A et articles 384 A à 384 A ter de son annexe II.
La dation en paiement : Un mode d’extinction de la dette
La définition du Code civil de la dation en paiement
La dation en paiement signifie que le débiteur pour se libérer totalement ou partiellement de son obligation remet au créancier un autre objet à la place de ce qui a été prévu dans le contrat.
C’est l’article 1342-4 alinéas 2 du Code civil relatif au régime général des obligations qui consacre ce mode de paiement. Ainsi, il dispose que le créancier peut accepter de recevoir en paiement autre chose que ce qui lui est dû. Cette remise doit être par conséquent, consentie par le créancier.
Par exemple, le débiteur d’une somme de 2 000 euros remet à son créancier un scooter ayant une valeur similaire ou moindre pour s’acquitter de toute ou partie de sa dette.
Il faut remarquer que la dation en paiement peut également consister en une prestation de services.
La définition de la dation en paiement en droit fiscal
La dation en paiement est un moyen de s’acquitter des dettes fiscales par la remise à l’État d’un objet artistique, historique, d’un immeuble et voire même d’une parcelle susceptible d’être incorporée au domaine forestier de l’État. Ces objets permettront à l’État d’enrichir considérablement la collection publique.
Les dettes fiscales prévues par le CGI sont les droits de succession, les droits sur les mutations à titre gratuit entre vifs (donations, legs) et les impôts de solidarité sur la fortune immobilière. Toutefois, elle ne peut être utilisée pour le règlement de l’impôt sur le revenu.
Les effets de la dation en paiement
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- L’extinction de la dette :
Une partie de la doctrine assimile la dation en paiement à la novation par changement d’objet du fait de la satisfaction du créancier malgré le changement de prestation. Ainsi, la dation en paiement éteint la dette.
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- La transmission du droit de propriété du débiteur vers le créancier
L’effet particulier de la dation en paiement sous forme de titres de société : la dation en paiement sous forme de titres de société entraîne la fin du sursis d’imposition de la plus-value; laquelle est une imposition de la transaction effectuée sur les titres.
En fait, le sursis d’imposition permet au propriétaire de titres de société de ne pas payer la plus-value dans le cadre de la vente de ses titres à condition de revendre lesdits titres pour en acheter d’autres. Dans le cas échéant, si la vente permet d’obtenir des liquidités, le sursis d’imposition est levé.
Les recours à la dation en paiement
La dation en paiement pour s’acquitter de la soulte successorale : en matière successorale, les parts des cohéritiers doivent être égales. Alors, un héritier peut recourir à la dation en paiement pour compenser une inégalité non justifiée dans le partage des biens.
La dation en paiement dans le cadre du droit immobilier
La dation en paiement est avantageuse pour les propriétaires de terrains qui veulent devenir propriétaires d’un logement ou d’un pavillon. En fait, ils peuvent convenir avec un promoteur immobilier de vendre leurs terrains, mais en contrepartie d’un logement et non d’une somme d’argent. La valeur du terrain pourra couvrir partiellement ou totalement le prix du logement.
En outre, la dation en paiement peut servir à s’acquitter de la plus-value immobilière à laquelle sont soumises les transactions immobilières effectuées par des particuliers ou des sociétés de personnes. Cette plus-value immobilière concerne la cession d’immeubles bâtis ou non bâtis, la cession des droits immobiliers tels que l’usufruit (définition ici) et la nue-propriété (définition ici) des parts de sociétés immobilières.
Cependant, certaines transactions sont exonérées du paiement de cette plus-value immobilière selon la nature du bien et le montant de la cession comme c’est le cas de la résidence principale.
La dation en paiement pour le paiement d’une dette fiscale
Le champ d’application de la dation en paiement en matière fiscale
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- Les biens concernés
Seuls certains biens sont concernés par ce mode de paiement dans un souci de conservation du patrimoine artistique national. Il s’agit des œuvres d’art, de livres, d’objets de collection ou de documents, de haute valeur artistique ou historique, d’immeubles situés dans les zones d’intervention du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres ou d’immeubles en nature de bois, forêts ou espaces naturels.
Ces biens ne doivent pas faire l’objet de deux refus d’agrément antérieurement, c’est-à-dire qu’ils ne doivent pas été déjà refusé pour payer d’autres dettes fiscales.
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- Les droits concernés
Les droits pouvant faire l’objet de la dation en paiement sont : Les droits de mutation à titre gratuit entre-vifs, le droit de partage et l’impôt de solidarité sur la fortune immobilière (ISF). Par ailleurs, il faut que les droits ne soient pas inférieurs à 10 000€.
La procédure d’agrément : Un préalable à la dation en paiement
Avant de pouvoir être utilisé pour payer une dette fiscale, le bien doit faire l’objet d’une procédure d’agrément prévue par l’article 384-0 A bis du Code général des impôts, annexe 2.
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- L’offre de dation en paiement
C’est le légataire ou alors l’héritier qui fait l’offre en précisant le bien, objet de la dation ainsi que sa valeur. Des photos de l’objet sont jointes pour faciliter l’examen du dossier.
La consultation de certaines personnes telles que des experts ou le président du comité des dations ou encore un conservateur spécialisé dans la discipline concernée par l’œuvre est nécessaire pour attester de la valeur de l’objet.
Le dépôt de cette offre suspend les intérêts de retard exigibles au titre de l’impôt concerné non acquitté. En contrepartie, le redevable reçoit un récépissé.
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- L’examen de l’offre : Procédure d’agrément proprement dite
L’offre est soumise à un examen méticuleux d’une commission consultative appelée commission interministérielle d’agrément et qui est composée d’un représentant du Premier ministre, de deux représentants du ministère de l’Économie et des Finances ainsi que de deux représentants du ministère en charge de la Culture.
Après l’examen de la sincérité et de la valeur des objets, la commission émet un avis sur lequel se basera le ministre de l’Économie et des Finances. En effet, ce dernier rend une décision qui peut être un octroi d’agrément ou un refus d’agrément de tous ou certains des objets proposés.
La décision est notifiée au contribuable par la direction générale des impôts par lettre recommandée avec accusé de réception.
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- L’acceptation de la valeur libératoire
Il faut noter que le ministre de l’Économie et des Finances a la possibilité d’établir des conditions à l’agrément ainsi que la valeur des objets. Il appartient donc au contribuable de les accepter ou non dans un délai de 30 jours.
Ainsi, il se peut que le redevable accepte une valeur inférieure à celle contenue dans l’offre de dation en paiement. Le redevable doit de ce fait verser un complément de droits au Trésor public. Par contre, si la valeur est supérieure à celle prévue par l’offre, aucune soulte n’est obligatoire. Le bien accepté en dation devient ainsi la propriété de l’État.
La dation en paiement : la différence avec l’exonération des droits de succession
En matière fiscale, ces deux procédures semblent identiques. Pourtant, il ne faut pas les confondre. La dation en paiement consiste à payer les droits de succession grâce à la remise d’un objet au lieu du paiement en liquide. En revanche, l’exonération de droits de succession anéantit l’obligation de payer les droits, quel que soit le mode de paiement.