Les pourparlers juridiques correspondent à la phase précontractuelle correspondant à des échanges divers ayant pour objectif de forger le consentement à contracter. Ils se déroulent sous l’égide de la liberté contractuelle. Chacun est libre de contracter avec qui il souhaite. Chacun est libre de négocier, sans obligation de conclure le contrat. Cependant, cette liberté est tempérée par les exigences de bonne foi et de loyauté pendant les pourparlers.
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Quelle est la définition des pourparlers contractuels ?
La définition des pourparlers contractuels est la suivante : le contrat de société est formé par la rencontre de l’offre ferme et précise et d’une acceptation sans équivoque. Cependant, dans certains contrats avec des exigences financières et commerciales, les pourparlers sont inévitables. Les pourparlers correspondent aux échanges écrits ou verbaux aux personnes manifestant la volonté de conclure le contrat.
Le Code civil de 1804 ignorait cette phase de discussion antérieure à celle de la naissance du contrat. La liberté contractuelle est totale, de sorte que les dispositions de l’article 1134 ancien ne prévoyaient uniquement que « les conventions étaient exécutées de bonne foi ». En omettant la phase de formation du contrat, le Code civil permettait des hypothèses parfois pouvant porter préjudice à un contractant.
La jurisprudence, alertée par la situation est venue remédier à des situations d’injustice. Elle a posé le principe de la liberté du droit de rompre en conformité avec le principe de la liberté contractuelle. Le pendant de ce principe a vu naître une limite, celle de l’abus du droit de rompre les pourparlers.
La réforme du droit des contrats de 2016 a consacré cette position de la jurisprudence aux articles 1112 [Contexte des négociations en droit français : Arrêt Manoukian] et suivants. Il est ainsi établi que « l’initiative, le déroulement et la rupture des négociations précontractuelles sont libres. Ils doivent impérativement satisfaire aux exigences de la bonne foi » (article 1112 alinéa 1 du Code civil).
Ce principe de liberté dans les phases de la négociation, de l’initiative à la rupture, appelle à quelques précisions qui pourraient être indispensables pour les parties aux pourparlers.
Ainsi, si les parties sont libres de refuser de négocier, elles doivent, dès qu’elles ont entamé des négociations, se plier à diverses contraintes. Il est donc important de déterminer le moment de l’ouverture des négociations. Cette détermination est d’autant plus utile que la jurisprudence tient souvent compte de la durée des négociations afin d’apprécier le caractère abusif de la rupture.
Les négociations s’ouvrent, sans qu’il soit besoin de formalité particulière, dès le moment où les parties ont entamé leurs discussions, animées des volontés de négocier. Ceci concerne aussi bien l’hypothèse où les partenaires discutent de façon informelle que celle où ils ont conclu un contrat portant sur les négociations. Il convient, en effet, de distinguer la formation du contrat et son exécution. Cette distinction est capitale quant au régime à appliquer.
Le contrat d’adhésion a admis la soustraction d’une partie aux négociations. La liberté contractuelle qui gouvernait la formation des contrats s’en trouve diminuée. De ce fait, rien n’oblige une entreprise, acheteur ou fournisseur, à négocier les termes d’un contrat.
Elle peut parfaitement ne laisser à ses éventuels partenaires que le choix de conclure ou non le contrat (dont un contrat de société), aux conditions qu’elle propose. Ainsi, le refus de négocier n’est donc pas fautif et ne saurait entraîner une condamnation à des dommages-intérêts.
Ce qui serait susceptible d’engager la responsabilité de son auteur est, comme évoqué plus haut, l’abus de droit de rompre les négociations. Pour rappel, l’abus de droit est une notion jurisprudentielle, qui est définie comme la faute commise dans les dépassements des limites dans l’exercice d’un droit.
Dans cette phase de pourparlers, sont également sécurisées les informations échangées. En effets, les négociants peuvent avoir accès à des renseignements sensibles.
Pour leur apporter une protection, l’article 1112-2 du Code civil prévoit que « celui qui utilise ou divulgue sans autorisation une information confidentielle obtenue à l’occasion des négociations engage sa responsabilité dans les conditions du droit commun ».
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Qu’est-ce que la liberté des négociations ?
La liberté des négociations : un des aspects de la liberté contractuelle, l’absence de conclusion du contrat en cours de discussion n’est pas condamnable. La jurisprudence l’affirme de manière constante en disant, par exemple, qu’en l’absence de conclusion du contrat (même un contrat consensuel), il n’y a pas lieu d’en faire grief aux auteurs de la rupture « qui n’ont jamais fait qu’user de la liberté qu’elles avaient de ne pas contracter » (Chambre commerciale de la Cour de cassation 12 janvier 1999 Compagnie de Suez).
Mais cette liberté ne joue pleinement que si elle est exercée loyalement et honnêtement. C’est le sens de l’article 1112 qui juxtapose dans son premier alinéa, la liberté dans les négociations et le respect impératif des exigences de bonne foi.
Du simple fait qu’elles entament des négociations, sous l’égide d’un contrat ou non, les parties ont l’obligation de conduire les pourparlers loyalement et de bonne foi. Ceci suppose qu’elles mènent de manière sincère les négociations, recherchant effectivement la réalisation d’un accord.
Serait de mauvaise foi la partie qui mènerait des négociations fictives, sans avoir l’intention de les voir aboutir, ou qui adopterait un comportement dilatoire, visant à perturber leur déroulement.
C’est l’hypothèse dans laquelle, par exemple, « le fait de conduire des pourparlers sur la base d’un prix exagéré, tout en menant des entretiens avec un tiers à un prix inférieur » (deuxième chambre civile de la Cour de cassation 4 juin 1975Commune de Saint-Pierre-en-Faucigny).
Cet arrêt a reçu une précision quant à l’incompatibilité entre l’exigence de bonne foi et l’absence d’exclusivité dans les négociations. Il a été décidé que « le simple fait de contracter, même en connaissance de cause, avec une personne ayant engagé des pourparlers avec un tiers ne constitue pas, en lui-même et sauf s’il est dicté par l’intention de nuire ou s’accompagne de manœuvres frauduleuses, un manquement de nature à engager la responsabilité de son auteur » (chambre commerciale 26 novembre 2003).
Le fait de prolonger une négociation dont on sait qu’elle ne peut aboutir, d’entamer des négociations afin d’empêcher le partenaire de contracter avec un tiers peut caractériser la mauvaise foi et une démarche abusive.
L’obligation de bonne foi est d’ordre public et impose aux parties de se comporter honnêtement en respectant notamment l’obligation d’information précontractuelle. C’est le premier tempérament au principe de la liberté totale et absolue de négociations issu de l’obligation de bonne foi. L’obligation d’information désormais prévue au premier alinéa de l’article 1112-1 du Code civil.
Ignorée du Code civil jusqu’à récemment, la jurisprudence a dégagé une obligation générale d’information précontractuelle, fondée avant la réforme sur les articles 1108 et 1109 du Code civil ou l’ancien article 1602 (« Le vendeur est tenu d’expliquer clairement ce à quoi il s’oblige »). Cette obligation générale a ensuite été complétée par des obligations légales plus spécifiques.
L’obligation d’information précontractuelle a intégré, dorénavant, le Code civil en ces termes « celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer ». Il faudra donc, en premier lieu une connaissance effective et non simplement présumée de l’information pour en être le débiteur. Ensuite, l’information due est celle dont « l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre ».
Certains auteurs considèrent que ces dispositions réduisent l’obligation à une information connue, non à celle que la partie aurait dû connaître. Il n’y a donc plus d’obligation de se renseigner pour informer à la charge de la partie débitrice de l’obligation d’informer.
Deux types de sanctions sont possibles. Elles sont prévues au dernier alinéa de l’article 1112-1 du Code civil. Il y est prévu la mise en cause de la responsabilité civil délictuelle du débiteur du devoir d’information.
Le cas échéant, ensuite, la possibilité d’obtenir l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants, si le défaut d’information a été à l’origine d’un vice du consentement (alinéa 6 de l’article 1112-1).
En parlant de droit des contrats, voir aussi : Pourquoi l’arrêt Poussin est-il fondateur pour la jurisprudence en droit des contrats ? Suivez le lien pour approfondir vos connaissances en matière de droit des contrats.
Quel est le régime juridique des pourparlers ?
Le régime juridique des pourparlers est caractérisé par une grande liberté. Le principe est qu’une personne, quand bien même elle aurait négocié, n’est jamais tenue de conclure le contrat en discussion.
L’ensemble de la phase précontractuelle répond donc au principe de la liberté contractuelle, bien qu’il ait été dit, de manière aussi caustique que réaliste, que la période des pourparlers était aujourd’hui soumise à un « régime général de liberté surveillée » (D. Mazeaud, La genèse des contrats : un régime de liberté surveillée).
En principe, l’échec des négociations n’est pas critiquable. Il n’est que la manifestation de la liberté contractuelle, qui permet à chacun de décider s’il veut ou non contracter. La rupture des relations précontractuelles n’a donné lieu pendant longtemps, qu’à un faible contentieux.
Les choses ont cependant évolué. La gestation d’un contrat définitif, souvent lente et progressive, a des répercussions financières importantes, dont certaines sont d’ailleurs parfois immédiates (frais de négociation, investissements préalables, etc.). Elle ne peut donc pas être abandonnée entièrement au bon vouloir des futurs contractants, lequel est parfois synonyme de légèreté ou de déloyauté.
C’est pourquoi la jurisprudence s’est efforcée d’introduire davantage de sécurité dans la phase de la négociation du contrat.
La traduction la plus concrète de ce phénomène réside dans l’accroissement très sensible du nombre d’affaires liées à la rupture fautive des pourparlers.
Les tribunaux sollicitent souvent la théorie de l’abus de droit pour retenir la responsabilité du négociateur qui a fait avorter la conclusion du contrat.
La liberté contractuelle, en effet, implique le droit de ne pas contracter et la limite de ce droit est l’abus que l’on peut en faire.
C’est la raison pour laquelle certains arrêts se réfèrent expressément à « l’abus du droit de rompre » les pourparlers (Cass Com, 7 janvier 1997) tandis que d’autres, plus vagues, parlent de « rupture abusive » (Cass Com, 5 mai 1987).
Qu’est-ce que c’est la rupture abusive des pourparlers ?
La rupture abusive des pourparlers c’est : la jurisprudence a jugé de manière casuistique l’aspect fautif d’une rupture compte tenu des circonstances d’espèce pour envisager la réparation du préjudice.
Il a donc été question de savoir, la nature de la réparation que pouvaient invoquer le négociant victime d’une rupture brutale des pourparlers. C’est désormais le dernier paragraphe de l’article 1112 du Code civil qui tranche la question en disposant qu’ « en cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte ne peut avoir pour objet de compenser la perte des avantages attendus du contrat non conclu ».
La solution désormais législative ne fait qu’entériner une évolution jurisprudentielle qui, après avoir été tentée un temps de considérer que le préjudice pouvait résulter de la perte d’une chance, l’a ensuite rejetée.
Certaines décisions, en matière, précontractuelles, semblaient reconnaître l’indemnisation de la perte de chance en cas de rupture des pourparlers lorsque cette chance perdure de conclure le contrat était sérieuse et entraînait la perte de chance de conclure une autre convention avec un tiers en lieu et place du projet de contrat objet des pourparlers.
Cependant, la haute juridiction a mis fin à ces oppositions dans l’arrêt « Manoukian » à l’occasion d’un litige en droit des sociétés.
La chambre commerciale a posé le principe selon lequel « les circonstances constitutives d’une faute commise dans l’exercice du droit de rupture unilatérale des pourparlers contractuels ne sont pas la cause du préjudice consistant dans la perte d’une chance de réaliser les gains que permettait d’espérer la conclusion du contrat ».
Elle a par ailleurs estimé que « la Cour d’appel a décidé à bon droit qu’en l’absence d’accord ferme et définitif, le préjudice … n’incluait que les frais occasionnés par la négociation et les études préalables auxquelles elle avait fait procéder et non les gains qu’elle pouvait … espérer tirer de l’exploitation du fonds de commerce ni même la perte d’une chance d’obtenir ces gains » dans le cas d’une non-conclusion du contrat, (Cass. Com 26 nov. 2003).
Toutefois, le nouvel article 1116 du Code civil consacré à la rétractation de l’offre de contracter nous donne quelques indications sur un cas particulier de rupture fautive : l’hypothèse dans laquelle l’offreur retire son offre « avant l’expiration du délai fixé par son auteur ou, à défaut, l’issue d’un délai raisonnable », ce qui rend impossible la formation du contrat projeté.
Le Code civil issu de la réforme de 2016 dispose alors que dans ce cas, une telle rétractation anticipée « engage la responsabilité extracontractuelle de son auteur dans les conditions du droit commun ».