Le juge départiteur est un juge qui intervient lorsqu’il existe un partage des voix entre les conseillers du Conseil prud’homal pour apporter une solution à la résolution d’un litige. En France, les litiges individuels, c’est-à-dire, impliquant les salariés et employeurs, ainsi que ceux concernant les contrats de travail sont réglés devant le Conseil prud’homal.
Par exemple, le conseil connaît des litiges en matière de licenciement abusif ou des demandes de requalification du contrat de travail. Le conseil est composé de conseillers prud’homaux qui sont des juges non professionnels.
Le litige est d’abord porté devant un bureau du conseil prud’homal nommé : bureau de conciliation et d’orientation (BCO). En cas d’échec de conciliation, l’affaire est portée devant le bureau de jugement qui juge sur le fond. La juridiction prud’homale étant une juridiction paritaire, ces deux bureaux sont composés de juges prud’homaux en nombre pair. La moitié de ces magistrats sont des conseillers salariés et l’autre moitié sont des conseillers employeurs.
Ainsi, il arrive que les deux bureaux ne puissent pas prendre de décision, car les voix sont partagées. De plus, les voix ont une valeur égale. Il est donc nécessaire qu’un autre juge puisse intervenir pour les départager. Ce juge est le juge départiteur.
Le statut du juge départiteur
Le juge départiteur est un juge que l’on appelle aussi un magistrat de carrière. La désignation du juge repose sur ses connaissances et aptitudes personnelles. Le président du tribunal judiciaire le choisit chaque année parmi les juges du tribunal judiciaire (depuis la fusion du tribunal de grande instance, le TGI et du Tribunal d’instance). Le tribunal judiciaire en question est celui du ressort du lieu de situation du Conseil prud’homal.
Le juge départiteur n’intervient que lorsque les conseillers n’ont pas pu se départager. Ce qu’il faut savoir, c’est qu’en moyenne, une affaire sur cinq est portée devant lui en France. Il faut noter que son intervention ne rend pas la juridiction prud’homale échevinale.
La saisine du juge départiteur
Le juge départiteur n’est saisi que lorsqu’il y a nécessité de départage. Sa saisine peut être d’office ou demandée.
La saisine du juge départiteur pour départage
En principe, les conseillers, membres du « bureau de jugement » et ceux du « bureau de conciliation et d’orientation » rendent un jugement à la majorité absolue. Cependant, lorsqu’ils n’ont pas réussi à prendre une décision, car les conseillers salariés sont en faveur du salarié et les conseillers employeurs sont en faveur de l’employeur, ils dressent un procès-verbal de partage de voix afin de saisir le juge départiteur. Il faut préciser qu’il est possible que le partage ne concerne que certains points de l’affaire. Ainsi, le départage ne portera que sur ces points.
Dès lors, les parties reçoivent le procès-verbal de départage qui est considéré comme une convocation à l’audience de départage. Il est aussi possible que les parties soient convoquées par le greffe du conseil. Ainsi, le but de la saisine du juge départiteur est de départager puisqu’il va émettre une voix qui départagera les voix. Sa voix n’est pas prépondérante.
Le juge départiteur est saisi dans un délai de 1 mois en principe. Mais dans la pratique, ce n’est que rarement le cas dans les conseils prud’homaux des grandes villes qui reçoivent beaucoup de dossiers à traiter. Il arrive qu’une audience en départage ne soit obtenue qu’après 6 mois ou 1 an. Les parties doivent être notifiées du renvoi devant le juge départiteur.
En passant, vous pouvez aussi consulter notre guide sur l’article 789 du Code de procédure civile. Découvrez sur ce guide le contenu de l’article 789 et sa portée, l’ordonnance du juge de la mise en état sur la fin de non-recevoir, ainsi que les limites et exceptions à ce super pouvoir du juge de la mise en état.
La saisine d’office du juge départiteur après un échec de conciliation
La procédure prud’homale cherche d’abord à concilier les parties et donc de régler les litiges à l’amiable. En effet, depuis la loi Macron, en matière prud’homale, la conciliation est la priorité. Ce n’est que si la conciliation échoue que l’affaire est transmise devant le bureau de jugement.
Cependant, les deux parties ont la possibilité de décider d’un commun accord la demande d’un départage dans le cas où le Bureau de Conciliation et d’Orientation n’arrive pas à départager. Dans ce cas, la saisine du juge départiteur est d’office.
Néanmoins, chaque partie peut également demander à elle seule le départage. Si la demande n’émane que d’une seule partie, le bureau de conciliation doit préalablement analyser l’affaire avant d’accepter ou de refuser la demande de départage.
Si la demande est acceptée, le bureau de conciliation et d’orientation choisie entre renvoyer l’affaire devant le bureau de jugement dans sa formation collégiale, soit dans sa formation présidée par un juge départiteur.
Dans l’hypothèse où le bureau de conciliation et orientation est partagé sur la demande, le bureau ne dispose pas de choix. L’affaire est renvoyée d’office devant le bureau de jugement présidé par le juge départiteur.
Les missions du juge départiteur
Le juge départiteur, un juge du tribunal judiciaire qui préside l’audience de départage et s’assure de juger au fond l’affaire qui lui est présentée.
Le juge départiteur : président de l’audience de départage
La formation des conseillers à l’audience a beaucoup évolué au cours du temps. Le décret Macron de 2017 prévoit la formation à l’audience de départage.
- La formation à l’audience de départage
Le conseil est saisi de nouveau et la formation convoquée durant l’audience est une formation spécifique. Une formation spécifique est composée de deux conseillers du BCO (Bureau de Conciliation et d’Orientation) avec un conseiller employeur et un conseiller salarié. Elle est présidée par le juge du tribunal judiciaire. Le juge départiteur se fait assister par les conseillers prud’homaux durant l’audience.
- L’audience de départage
Le juge départiteur préside l’audience de départage. Cette audience suit la procédure de conciliation, la procédure de jugement du conseil prud’homal ou la procédure de référé. Cette audience doit avoir lieu dans les 30 jours du renvoi devant le juge départiteur et dans les 15 jours en matière de référé.
Les conseillers prud’homaux de la formation doivent, en principe, être présents. Dans le cas échéant, le conseiller absent doit trouver un remplaçant. Toutefois, il est fréquent que les conseillers soient absents et ne soient pas remplacés dans les faits.
Le juge départiteur : juge de l’affaire
De nouvelles plaidoiries sont effectuées devant le juge départiteur. Le juge départiteur devra à la fin des débats, statuer seul après avoir consulté les conseillers. Même si la formation est incomplète ou absente, il doit statuer.
Il doit de ce fait, statuer, outre les demandes initiales, sur de nouvelles demandes. Il va devoir aussi statuer au fond si le défendeur présente un nouveau moyen de défense. Si la décision n’est pas rendue immédiatement après les débats, le juge doit indiquer aux parties une date ultérieure pour le prononcé du jugement. Le juge a l’obligation de motiver la prorogation.
La décision du juge départiteur susceptible de contestation
Les jugements du juge départiteur sont susceptibles d’appel s’ils sont rendus en premier ressort. Il convient de rappeler qu’il faut respecter le délai d’appel de 1 mois à partir de la notification par le greffe de la décision par lettre recommandée avec accusé de réception. Ce sont les juges professionnels de la Cour d’appel qui connaîtront de l’affaire.
Les jugements issus du départage peuvent également faire l’objet d’un pourvoi en cassation si les jugements sont rendus en dernier ressort.
Il est à remarquer que la représentation est obligatoire en appel. La représentation est non seulement assurée par les avocats, mais également par le défenseur syndical.