Les décisions prises par le juge aux affaires familiales constituent le levier des règlements des contentieux familiaux. Spécialisé dans le droit de la famille, le juge aux affaires familiales que l’on appelle aussi le JAF est chargé de statuer sur les litiges concernant les procédures de divorce ainsi que sur les conséquences qui en découlent.
Le juge aux affaires familiales a aussi la compétence pour trancher les litiges relatifs aux couples non mariés ainsi que les questions relatives à l’autorité parentale.
Sa particularité réside dans le fait qu’il statue seul, ce qui est différent de ses pairs qui statuent en principe collégialement. Toutefois, cela ne rend pas ses décisions moins importantes, car les enjeux pour les familles sont souvent considérables et spécialement pour ce qui concerne les enfants.
Voilà pourquoi, les décisions du juge aux affaires familiales sont commandées par le principe éminent de l’intérêt supérieur de l’enfant.
Par ailleurs, il est régulièrement assisté par plusieurs auxiliaires de justice spécialisés tels que les enquêteurs sociaux, les psychiatres, etc. Leur travail lui apporte les éléments nécessaires pour venir appuyer sa décision finale et participe à une bonne justice.
Après un bref rappel de la définition du JAF ainsi que du rôle du juge aux affaires familiales, nous verrons comment le JAF est saisi et comment il mène à bien ses dossiers.
Définition et rôles du JAF : Le juge aux affaires familiales
La particularité du juge aux affaires familiales par rapport aux autres rôles des juges du tribunal français est qu’il statue seul. Par ailleurs, il est le seul compétent pour les régler les questions concernant les affaires matrimoniales.
Le statut du JAF dans l’ordre judiciaire
Les juges dans l’exercice de leur fonction peuvent se voir attribuer soit le statut de magistrat de siège, soit celui de magistrat debout c’est-à-dire du parquet. Leurs missions auprès de l’ordre judiciaire diffèrent en ce sens que les magistrats de siège sont par définition les juges qui prononcent les jugements et font appliquer la loi.
D’ailleurs, on les appelle les magistrats du siège, car ils restent assis la majeure partie du temps lors de l’examen de l’affaire devant le tribunal.
À contrario, les magistrats debout sont appelés ainsi, car lors des audiences auxquelles ils participent, ces magistrats ont pour coutume de prendre la parole debout. Les magistrats du parquet ou debout ont pour rôle de requérir l’application de la loi dans l’intérêt général de la société. Au sein des tribunaux, ils sont les représentants du ministère public.
Quant est-il du juge aux affaires familiales ?
Le juge aux affaires familiales fait partie de cette catégorie. Par conséquent, il applique les règles de droit relatives aux affaires matrimoniales et rend les jugements en tenant compte de celles-ci.
Par ailleurs, le juge aux affaires familiales est assisté dans son travail par des professionnels que l’on appelle les auxiliaires de justice. Ces derniers, qui peuvent être des enquêteurs sociaux, des psychologues ou encore des psychiatres, renseignent le juge après avoir mené leurs enquêtes sur le terrain et après avoir établi un bilan psychologique, moral et financier de la famille.
Les contentieux familiaux étant des contentieux privés, le tribunal compétent pour y statuer est le tribunal judiciaire (anciennement le tribunal de grande instance ou plus communément appelé le TGI). Les juges du tribunal judiciaire statuent soit en collégialité, mais peuvent également statuer seuls. Le juge aux affaires familiales se retrouve dans cette dernière situation.
La saisine du juge aux affaires familiales suit la même procédure judiciaire que celle des autres juges, c’est-à-dire ceux qui statuent en collégialité, à savoir :
L’audience est tenue et rendue oralement
La présence des parties ou de leurs représentants est donc obligatoire.
Le caractère contradictoire du procès
Il garantit pour chaque partie le droit d’être informé d’une procédure judiciaire, de connaître les arguments relatifs aux faits comme au droit que la partie adverse lui oppose.
Le JAF : Principal intervenant sur les litiges relatifs aux affaires matrimoniales
La mission du juge aux affaires familiales est expressément précisée par l’article 287-2 du Code civil. En effet, selon cet article : Dans un premier temps, il collecte les informations relatives à la situation de la famille objet du contentieux c’est-à-dire les circonstances psychologiques, morales ou encore financières dans lesquelles les enfants vivent ; pour ensuite appuyer ses décisions qui sont toujours rendues dans l’intérêt de ces derniers.
Le juge aux affaires familiales est principalement compétent en application de la loi dans les cas suivants :
- La modification du régime matrimonial des couples en concubinage, mariés ou encore liés par un pacte civil de solidarité
- Les procédures de divorce qui vont de la séparation des corps jusqu’à ses conséquences, telles que la liquidation du régime matrimonial pour les couples mariés ou ceux liés par un pacte civil de solidarité
- L’existence de violences conjugales ou encore de violence sur une personne majeure qui est forcée au mariage
- La fixation de l’exercice de l’autorité parentale, l’apport des charges relatives à l’éducation et à l’entretien des enfants ainsi que de l’obligation alimentaire
Toutefois, les compétences du juge aux affaires familiales ont été limitées depuis l’introduction de nouvelles lois, cela concerne notamment :
- Le divorce, qui à la suite de la Loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016, peut être réglé à l’amiable ou communément dénommé « divorce par consentement mutuel »
- La procédure de changement de prénom se fait désormais auprès de la mairie; elle donc est effectuée par un Officier d’État civil, à la suite de la Loi de modernisation de la justice
Comment saisir le juge aux affaires familiales ?
Pour saisir le juge aux affaires familiales, il est nécessaire de suivre les règles relatives aux procédures habituelles des contentieux privés.
D’une part, la saisine du JAF prend des aspects singuliers en ce sens qu’elle implique une médiation familiale au préalable, mais aussi l’existence de cas de figure qui nécessite l’exécution d’une procédure d’urgence ; et d’autre part l’obligation ou non de faire appel à un avocat.
Les aspects que prend la saisine du juge aux affaires familiales
La médiation familiale
La médiation familiale peut se faire soit à la demande des parties soit à la demande du juge.
Le juge aux affaires familiales accorde une importance singulière à la médiation, car elle atteste en quelque sorte de la volonté des deux parties de trouver une solution au conflit, surtout s’ils ont des enfants.
Par définition, la médiation est une démarche de conciliation. Elle est menée par un médiateur dans le but d’apaiser les tensions familiales, de trouver des solutions à l’amiable et acceptable pour les parties en cause afin d’éviter l’étape du passage devant le tribunal ainsi que pour préserver les relations familiales.
La médiation est régie par l’art 131-5 jusqu’à l’article 131-15 du code de procédure civile.
Par ailleurs, le fait de ne pas chercher à recourir à la médiation familiale avant de saisir le JAF peut constituer un motif d’irrecevabilité pour les parties.
Les cas de figure nécessitant une procédure d’urgence
L’urgence justifie la saisine dans les plus brefs délais du juge aux affaires familiales. On entend par urgence dans les contentieux familiaux : Les cas de violences conjugales, la mise à la porte du ou des mineurs du domicile familial et les cas où l’un des conjoints a emmené leurs enfants loin du domicile familial.
Afin que la convocation du juge arrive le plus vite possible, il convient à la partie concernée de :
- Faire délivrer une assignation qui peut être rédigée par un avocat ou un huissier de justice. Cette assignation doit être accompagnée de la justification de l’urgence
- Demander une date d’audience auprès du greffe du JAF dans les plus brefs délais
- Procéder à la délivrance de l’assignation au domicile de celui auquel elle est l’objet et sinon, recourir aux services d’un huissier de justice
- S’assurer que l’affaire soit appelée en audience en déposant, auprès du greffe du JAF, l’original de l’assignation
L’obligation ou non de faire appel à un avocat
Saisir le JAF ne nécessite pas forcément de recourir aux services d’un avocat. Cependant, il existe des situations pour lesquels l’intervention de ce dernier est impérieuse.
Saisir le JAF sans recourir à un avocat
La saisine du juge aux affaires familiales peut se faire par deux moyens dans le cas où l’une ou les deux parties ne veulent pas faire appel à un avocat :
- Rédiger une requête à adresser au JAF et à déposer au secrétariat du greffe du tribunal judiciaire par lettre recommandée avec accusé de réception.
- Remplir le formulaire mis en ligne par le ministère de la Justice : Le cerfa n° 11 530*06
Il est toutefois à préciser que les requêtes sont susceptibles d’irrecevabilité si elles ne sont pas accompagnées des :
- Documents justificatifs requis
- Des mentions des noms, prénoms, adresse des parties ; l’objet de la demande et l’exposé sommaire des motifs de la saisine
Par ailleurs, si les parties veulent quand même recourir aux services d’un avocat, c’est ce dernier qui se chargera de rédiger une assignation en justice.
À noter également que des aides juridictionnelles sont disponibles quant au recours à un avocat.
Les cas qui justifient obligatoirement l’intervention d’un avocat
Les services d’un avocat sont obligatoires dans les cas suivants :
- La demande de divorce
- La séparation des corps pour les parties mariées
- La demande d’obtention de droit de visite et d’hébergement pour un ou plusieurs enfants dont la partie concernée n’est pas leurs parents
En d’autres termes, les parties peuvent saisir le juge aux affaires familiales pour des motifs autres qu’énoncés précédemment et en suivant ce que précise la loi :
Sans avoir à recourir à un avocat pour la remise en cause des contributions pour l’entretien et l’éducation des enfants ainsi que l’exercice de l’autorité parentale ou encore la modification des dispositions du droit de visite ou d’hébergement ou encore de la résidence habituelle des enfants.
En parlant de divorce, lisez aussi notre fiche de cours sur l’article 233 du Code civil. Un article fondamental se rapportant au droit de la famille et plus particulièrement au divorce accepté !
La requête du juge aux affaires familiales
La déposition d’une requête pour saisir le JAF doit se faire en tenant compte du tribunal judiciaire territorialement compétent et si cette même requête est recevable, elle sera suivie d’une convocation en audience des parties.
Le tribunal judiciaire compétent
La première question à se poser avant de saisir le JAF : où déposer la requête pour le juge aux affaires familiales ?
Le principe qui s’applique est bien évidemment celui de la compétence territoriale du tribunal. Voyons les différentes situations ainsi que le tribunal territorial compétent :
Les parents qui vivent encore ensemble
Le tribunal compétent est celui de la résidence familiale.
Les parents sont séparés
Le tribunal compétent est celui de la résidence du parent qui héberge habituellement le ou les enfants, dans la mesure où il est question de l’exercice de l’autorité parentale partagée.
S’il est question d’une autorité parentale exercée par un seul parent, la requête doit nécessairement être déposée devant le tribunal du lieu de la résidence de ce parent et dans la mesure où il n’est question d’aucune de ces situations, le tribunal territorialement compétent est celui de la résidence du défendeur.
La convocation en audience des parties
La préparation d’une audience doit être réalisée en amont. En effet, la période qui suit la délivrance de la convocation et l’audience permet à chaque partie de bien se préparer. Pour ce faire, elles doivent de se munir :
- Des justifications
- Des copies des éléments du dossier constituant la requête
- Des arguments
- Des preuves nécessaires pour appuyer sa demande
La pièce d’identité doit être obligatoirement présente avec les parties lors des audiences.
Les dossiers du juge aux affaires familiales
La saisine du juge aux affaires familiales par les époux ou les parents en voie de séparation ou séparés, implique la constitution d’un dossier et peut impliquer des frais dans le cas où les parties font appel à un avocat.
La constitution du dossier
Les pièces qui doivent être obligatoirement présentes dans ce dossier sont :
- Copie de la pièce d’identité de la ou des parties ;
- Copie intégrale de l’acte de naissance de la ou des parties ;
- Copie intégrale de l’acte de mariage et du livret de famille le cas échéant
- Copie entière de l’acte de naissance de chaque enfant concerné par le litige
- Copie de toute autre décision de justice ayant un lien avec la situation familiale des parties
- Copie du jugement ayant prononcé la séparation des corps ou le divorce
Il est impératif de constituer ce dossier et donc de n’oublier aucune pièce sous peine d’irrecevabilité.
Il est également bon de savoir que le ministère de la Justice a mis à disposition des parents ou époux séparés ou en voie de séparation, le formulaire Cerfa n° 11530*11 pour obtenir un jugement du JAF concernant la modification ou la fixation de :
- L’attribution et les conditions d’exercice de l’autorité parentale
- Le droit de visite et d’hébergement ainsi que la résidence habituelle des enfants
- La pension alimentaire
Les procédures payantes
Saisir le JAF n’est pas payant. Toutefois, si les parties font appel aux services d’un avocat qui s’est spécialisé en droit de la famille alors elles devront s’acquitter de ses honoraires.
En effet, les honoraires comprennent la constitution des dossiers requis, la rédaction de l’assignation et surtout l’expertise de ce professionnel du droit, notamment pour les questions relatives aux pensions alimentaires, la garde alternée ou encore la liquidation du régime matrimonial.
Si toutefois, les parties intéressées n’ont pas les moyens de s’acquitter de ces frais, il est possible pour elles de bénéficier de l’aide juridictionnelle. Cependant, cela prend plus de temps et les procédures d’urgence sont parfois plus difficiles à engager.
Pour finir, le juge aux affaires familiales est compétent dans les procédures de divorce, d’après divorce, c’est-à-dire des conséquences qui en découlent, de l’autorité parentale et bien d’autres encore. Sa mission s’inscrit dans le cadre de la conciliation et la recherche de la meilleure solution pour protéger les intérêts des parties.
L’importance du juge aux affaires familiales réside également dans le fait que près de 45 % des mariages en France se soldent par le divorce.
Ainsi, la question de la sécurité et du bien-être de l’enfant devient de plus en plus primordiale et c’est ainsi qu’au fil des décennies, le législateur n’a cessé de consolider le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant. En effet, toutes les décisions du juge aux affaires familiales doivent être motivées par cet intérêt et vont dans ce sens.