Qu’est-ce que la caducité du contrat ?

caducité du contrat

La caducité du contrat est la sanction liée à la perte de l’un des éléments essentiels du contrat. Le contrat sera donc anéanti comme dans le cas de la nullité. On dit que le contrat est alors caduc. La caducité du contrat est énoncée à l’article 1186 du Code civil que dispose qu’« un contrat valablement formé devient caduc si l’un de ses éléments essentiels disparaît ».

Pour autant, ces deux sanctions (caducité et nullité) ne doivent pas être confondues.

Le contrat est un accord de volonté entre deux parties (voir contrat de société). Ainsi, lorsque celle-ci se rencontre les deux parties sont liées le temps qu’elles remplissent chacune leurs obligations réciproques.

Néanmoins, le contrat peut prendre fin avant la réalisation des conditions respectives des parties. Deux types de sanctions peuvent mettre fin au contrat avant que les parties réalisent leurs obligations, ces 2 sanctions sont la nullité et la caducité. Dans cet article « guide et méthodologie juridique », nous allons nous intéresser uniquement à la caducité du contrat.

Dans un premier temps, on distinguera la caducité de la nullité du contrat puis dans un second temps nous approfondirons la caducité du contrat.

Différence entre caducité du contrat et nullité du contrat

La nullité et la caducité du contrat emportent la même conséquence, à savoir l’anéantissement du contrat. Pour autant, si ces deux sanctions portent des noms différents, c’est bien pour une raison elles n’interviennent pas dans les mêmes situations.

On peut donc se poser légitimement la question de savoir …

Quand un contrat est-il nul ?

Selon les sources formelles du droit, un contrat est nul lorsque celui-ci a été conclu alors qu’il ne remplissait pas toutes les conditions de sa validité article 1178 al. 1 du Code civil. Un contrat frappé de nullité sera anéanti et on fera comme ci, il n’avait jamais existé. C’est de la fiction juridique.

Quand un contrat est-il caduc ?

La caducité du contrat n’interviendra pas parce que le contrat n’avait pas toutes les conditions requises à sa validité, mais, car l’un des éléments essentiels à la validité a disparu après la conclusion de celui-ci. On dit alors que le contrat est caduc.

Précision sur les notions de caducité et nullité des contrats

Voilà toute la subtilité de ces deux sanctions, la première sanctionne le fait que toutes les conditions n’ont pas été remplies, la deuxième elle, sanctionne le fait qu’un ou plusieurs éléments essentiels disparaissent après la conclusion du contrat, mais aucune ne sanctionne le manquement aux obligations contractuelles.

On a donc deux sanctions une qui sanction un élément qui était essentiel, mais qui n’a jamais été présent dans le contrat, l’autre, un élément essentiel qui était présent, mais qui a disparu après la conclusion du contrat.

Maintenant que nous savons bien faire la distinction entre la caducité et la nullité, envisageons spécifiquement la caducité.

La caducité

La caducité est donc une sanction qui intervient à la suite de la perte d’un élément essentiel au contrat. La caducité du contrat est régie par le Code civil, mais par quel article du Code civil, est-elle régie ?

Quel article pour la caducité du contrat ?

La caducité du contrat est régie par l’article 1186 du Code civil qui dispose expressément à son alinéa 1 qu’« un contrat valablement formé devient caduc si l’un de ses éléments essentiels disparaît ».

La question légitime qu’il convient de se poser est de savoir ce qu’est un élément essentiel du contrat

En passant, découvrez aussi la définition du contrat d’adhésion. Définition prélevée de l’article 1110 du Code civil introduit par l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.

Qu’est-ce qu’un élément essentiel du contrat ?

Cette expression « d’élément essentiel » est relativement vague. En effet, O. Deshayes dans son commentaire de l’article y voir d’ailleurs une « démission législative ». Selon lui, l’idée générale serait la suivante « le contrat est, toute sa vie durant, portée par des « éléments » alimentant en continu sa force obligatoire, à la manière d’un courant électrique » : donc la perte de l’un de ces éléments entraînera dans sa chute la perte du contrat. Dès lors, on pourrait envisager a priori deux séries d’éléments.

Premièrement, l’expression « éléments essentiels » pourrait viser les éléments essentiels à l’exécution du contrat, et leur disparition rendrait impossible l’exécution du contrat (ex : un contrat d’approvisionnement porte sur une marchandise retirée du commerce).

Mais généralement, dans ce genre d’hypothèse, on n’invoque pas la caducité du contrat, mais plutôt la résolution pour cas de force majeure prévu à l’article 1218 du Code civil. Cela montre que la caducité du contrat sera invoquée que si les conditions de la force majeure ne sont pas réunies.

Ainsi, si des parties envisagent une convention de fourniture de marchandises sur une certaine durée alors qu’il est prévisible qu’avant même l’échéance, la marchandise sera retirée du marché, les conditions de la force majeure ne seront pas remplies, mais resteraient la voie de la caducité.

Deuxièmement, l’expression pourrait viser les éléments en considération desquels une partie s’était engagée, en ce que leur disparition bouleverse le contexte dans lequel le contrat avait été conclut.

Par exemple, une des parties s’est engagée en considération de la personne du cocontractant qui est décédée, c’est ce qui est arrivé dans un arrêt Civ. 2e, 23 mai 1973, B. 172 : il était prévu à la convention que les parties s’engageaient à recourir à l’arbitrage d’un sieur Y « en présence duquel ladite clause avait été acceptée, était décédée et qu’ainsi cette clause, dont l’exécution était impossible, était devenue caduque ; (…) en se déterminant ainsi, dans l’exercice du pouvoir souverain qui lui appartenait pour donner à la clause litigieuse une interprétation rendue nécessaire par le décès de l’arbitre désigné, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ».

Autre exemple, le contrat de société de l’article 1832 du Code civil : une partie s’est engagée en considération d’un élément autre que la considération de la personne du cocontractant et qui a disparu, exemple Civ. 1ère, 30 octobre 2008, B. 241 :

« ayant, par une recherche de la commune intention des parties, caractérisé l’engagement à exécution successive de M. Y…, la cour d’appel a constaté la disparition de la cause de cet engagement, partant sa caducité » (une reconnaissance de dette pour une durée déterminée est prise par un père à l’égard de la mère en vue de pourvoir à l’éducation et l’entretien de son fils qui était alors à la charge de sa mère, alors qu’il vient à obtenir la charge exclusive de son fils) ;

Civ. 1ère, 10 septembre 2015, pourvoi n° 14-20498 : M. X avait voulu partager à parts égales avec M. Y… tous les avantages perçus de la société, afin de préserver une bonne entente avec un cadre dont il estimait la présence nécessaire pour le développement et le redressement de l’entreprise ; la cour d’appel « a pu en déduire que l’engagement unilatéral à durée indéterminée de M. X…, privé de cause à compter de la démission de M. Y… le 27 mars 2009, était devenu caduc à compter de cette date ».

Civ. 1ère, 15 décembre 2010, B. 270 : « pour dire que les testaments des parents X… étaient caducs l’arrêt retient que ces actes indiquent expressément que la volonté de leurs auteurs est d’assurer l’égalité entre leurs quatre héritiers, que les consorts X… ayant restitué à leurs parents le fonds de commerce objet de la donation du 19 mai 1994, au décès de leurs auteurs ils n’étaient donc plus gratifiés d’aucune libéralité et, en conséquence, que les testaments du 5 avril 1995, dont la seule cause avait disparu avec la restitution de la donation précitée, étaient devenus caducs ; (…) en statuant ainsi alors qu’il appartient exclusivement au testateur, capable, de tirer les conséquences de la disparition prétendue de la cause qui l’a déterminé à disposer, la cour d’appel a ajouté aux cas légaux de caducité du testament, violant ainsi par fausse application les [anciens articles 1131 et 1039 à 1043 du Code civil] ».

En matière de cautionnement, la Cour de cassation décide traditionnellement que « que la cessation des fonctions de gérant de la société cautionnée n’emporte pas, à elle seule, la libération de la caution, sauf si celle-ci a fait de ces fonctions la condition déterminante de son engagement et qu’il résultait de l’acte de cautionnement que celui-ci ne comportait pas une telle stipulation expresse » (Com. 14 octobre 2008, pourvoi n° 07-16947).

Civ. 1ère, 17 janvier 1995, B. 29 : l’agent immobilier qui, sans s’assurer du consentement du bailleur, propose à la signature des parties un acte de cession de bail commercial, privé de tout effet, doit restituer les honoraires indûment perçus ;

Civ. 1ère, 16 décembre 1986, B. 301 : Dans un contrat de vente, la personne ayant versé à une autre la somme nécessaire à l’acquisition d’un véhicule à charge pour cette dernière de l’accompagner et de la transporter la première, peut obtenir restitution de la somme versée si les deux parties ont par la suite cessé toute relation, est légalement justifié l’arrêt qui condamne la personne bénéficiaire de la somme à en restituer une partie à l’autre.

Beaucoup d’autres exemples de jurisprudence peuvent être cités, mais ce qui est important est que l’on voit bien ici la proximité avec la nullité pour erreur, la différence entre les deux serait donc d’ordre temporel. L’erreur intervient avant la conclusion du contrat tandis que la caducité du contrat, elle intervient après la conclusion du contrat.

Troisièmement, l’article vise aussi la non-réalisation d’un élément essentiel à la perfection de l’acte. Un contrat qui est réalisé sous une condition suspensive est, si l’on fait preuve de logique, encore caduc tant que la réalisation de la condition suspensive n’est pas encore intervenue (art. 1304-6 al. 3 : « En cas de défaillance de la condition suspensive, l’obligation est réputée n’avoir jamais existé. »). Par exemple, la vente d’un immeuble sous condition de l’obtention d’un prêt est caduque si le prêt n’est pas accordé.

Quatrièmement, l’arrivée de l’échéance de l’acte. Il est également possible de considérer qu’un contrat est caduc, bien que cela ne soit pas expressément prévu de manière générale par le Code civil, lorsqu’il arrive à son terme. C’est la solution d’ailleurs expressément prévue au sujet de l’offre, « caduque à l’expiration du délai fixé par son auteur ou, à défaut, à l’issue d’un délai raisonnable » (art. 1117 al-1).

Par ailleurs, pour des raisons de politique juridique, il est également prévu que l’offre est caduque « en cas d’incapacité ou de décès de son auteur, ou de décès de son destinataire » (art. 1117 al. 2).

Cinquièmement, la disparition d’un contrat indivisible (art. 1186 al. 2 et 3). Lorsque plusieurs contrats sont indivisibles, l’anéantissement de l’un emporte la caducité de l’autre.

Maintenant que l’on sait ce qui peut rendre un contrat caduc, il est bon de s’intéresser à la mise en œuvre de la caducité du contrat.

Par ailleurs, si vous voulez approfondir vos connaissances en matière de droit des contrats, nous vous avons préparé « Qu’est-ce qu’un contrat synallagmatique ? ». Visitez la page via ce lien.

La mise en œuvre de la caducité du contrat

Comment peut-on mettre en œuvre la caducité du contrat ? Est-ce que l’intervention du juge est indispensable pour prononcer la caducité du contrat ? C’est ce que nous allons voir dans les prochains développements.

Comment rendre un contrat caduc ?

La question de comment rendre un contrat caduc est intéressante, mais le Code civil n’y répond pas explicitement. Aucune disposition n’est consacrée à la mise en œuvre de la caducité du contrat, seul son effet est visé par l’article 1187 alinéa 1 du Code civil, il « met fin au contrat ». Dès lors la caducité du contrat est-elle ou non de plein droit, a-t-on besoin ou non de l’intervention d’un juge pour la prononcer ?

L’intervention d’un juge est-elle nécessaire pour prononcer la caducité d’un contrat ?

Dans le silence de la loi, c’est à la raison et au pragmatisme qu’il faut s’en remettre, lesquels invitent à distinguer deux choses :

Soit, l’exécution du contrat est objectivement devenue impossible, sans que l’on soit en présence d’une cause de résolution du contrat : la caducité du contrat jouerait alors de plein droit à supposer que ce soit le cas pour la force majeure.

Soit l’exécution du contrat est encore objectivement possible, mais le contexte dans lequel il a été conclu a été tellement modifié que l’on est en présence d’une cause de caducité : la caducité du contrat doit être prononcée, et doit pouvoir l’être par les parties qui ont perdu l’élément qui servait leur, sans intervention du juge.

Pour finir, il est bon de préciser que les avant-contrats aussi peuvent être frappés de la caducité.

La caducité de l’offre

L’offre est un avant-contrat qui peut être frappé de caducité, mais quelles sont les causes qui peuvent rendre caduque une offre ?

Quelles sont les causes de la caducité de l’offre ?

La caducité de l’offre est prévue par l’article 1117 du Code civil. L’offre est un avant-contrat qui n’a pas une durée illimitée, celle-ci est fixée par son auteur ou à défaut un délai raisonnable. Lorsque ces délais arrivent à expiration, l’offre est « caduque » ce qui signifie qu’elle s’éteint, article 1117 al. 1 du Code civil. C’est ce qu’on appelle le délai d’efficacité. L’offre peut par ailleurs devenir caduque avant même l’expiration de l’offre notamment dans le cas du décès ou de l’incapacité de l’offrant ou du décès de son destinataire, article 1117 al. 2 du Code civil.

C’est ce que prévoit le Code civil pour autant existe il d’autre cause de caducité de l’offre ? Il semblerait bien que oui, le refus de l’offre par exemple rende celle-ci caduque, car le dentinaire a marqué sa volonté de ne pas l’accepter.

Pour conclure

La caducité du contrat est une sanction due à la perte d’un des éléments essentiels du contrat et qui entraînera l’anéantissement du contrat, elle se rapproche de la nullité dans ses effets, mais ses conditions d’application sont pour autant différentes.

Enfin, elle ne peut être confondue avec d’autres sanctions qui arriveraient dans le cadre d’une clause pénale par exemple. Les cocontractants ont donc tout intérêt à faire en sorte que les éléments considérés comme essentiels subsistent pour ne pas voir leur contrat frappé de caducité.

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