Qu’est-ce qu’un acte administratif unilatéral ?

acte administratif unilatéral

L’acte administratif unilatéral désigne un acte administratif que prend la puissance publique dans le cadre de sa mission à l’endroit des administrés sans que ceux-ci n’aient donné leur approbation. En réalité, à côté du contrat administratif, l’autre moyen laissé à l’administration pour agir est la prise d’actes unilatéraux.

Dans cet article nous vous expliquerons ce que recouvre la notion de l’acte administratif unilatéral. Dans la première partie de notre analyse, nous lèverons le voile sur le concept d’acte administratif unilatéral en donnant un aperçu général de ce type d’acte administratif. Puis dans une seconde partie, nous nous aborderons son régime juridique.

Aperçu général de l’acte administratif unilatéral

Présentation de l’acte administratif unilatéral

Caractéristiques de l’acte administratif unilatéral

Pour qu’un acte administratif unilatéral soit déclaré comme tel, il doit d’abord répondre à certaines conditions :

Il doit s’agir d’un acte juridique. On s’attache ici aux effets de droit produit par l’acte. S’il ne génère pas des droits ainsi que des obligations, alors il ne peut pas être considéré comme un acte administratif unilatéral.

L’acte doit provenir de la volonté d’une personne unique. C’est ce critère principal qui le différencie du contrat administratif, qui lui, provient de la volonté de plusieurs personnes.

Par ailleurs, l’acte doit être pris par une autorité administrative, chargée d’assurer l’intérêt général, et non pas par une simple personne privée.

La diversité des actes l’administration

Le droit administratif a mis en place une diversité d’actes administratifs unilatéraux. On peut les catégoriser en différents volets. Pour notre analyse, nous allons différencier les actes réglementaires de ceux qui ne le sont pas. Ensuite, nous distinguerons les actes qui portent grief de ceux qui ne portent aucun grief.

Différence entre l’acte réglementaire et l’acte non réglementaire

Un acte réglementaire ne donne pas de précision par rapport à ses destinataires. On dit qu’il a d’abord une portée générale (adressée à tout le monde) et ensuite impersonnelle (sans nommément citer des personnes). Ainsi, une décision générale et impersonnelle régit toute personne qui répond aux critères de son domaine d’application, que cette personne soit elle-même une autre autorité administrative ou un simple administré.

Exemple pratique : Le préfet prend un arrêté obligeant tous les motocyclistes à porter un casque dès lors qu’ils sont sur leurs motos en marche. La sanction prévue pour le non-respect de cet arrêté est le paiement d’amendes.

Commentaire : Cet arrêté est créateur de droit et toute personne surprise, roulant à moto, sans casque sera considérée comme en situation d’irrégularité et paiera les amendes prévues.

Pour ce qui concerne les actes non réglementaires, il s’agit en premier lieu de décisions individuelles prises par les pouvoirs administratifs. Comme son nom le désigne, l’acte individuel est dirigé vers des personnes connues : on dit qu’il a une portée individuelle. Il nomme le destinataire et vient souvent en réponse à une demande introduite par celui-ci. En général, les actes individuels sont pris soit pour autoriser les personnes privées à poser des actes, ou pour leur interdire d’agir dans un sens donné.

Exemple pratique : Le ministère des Affaires étrangères refuse de délivrer le titre de séjour à un individu qui est suspecté d’être en liaison avec un groupe criminel.

Commentaire : il s’agit d’un acte administratif individuel parce qu’il est pris contre cet individu précisément. Ainsi au même moment, d’autres personnes se verront accorder un titre de séjour.

Ensuite, au titre des actes non réglementaires, on peut mentionner aussi les décisions d’espèce. Ces dernières n’appartiennent à aucune des classes citées précédemment.

En réalité, non seulement, elles ne concernent pas des personnes identifiées (comme c’est le cas pour les actes administratifs individuels), mais aussi elles n’ont pas de caractère général ou impersonnel (comme c’est le cas pour les actes réglementaires).

À travers leur édiction, l’autorité administrative vise le respect de certaines normes prévues dans des domaines particuliers.

Exemple pratique : la déclaration d’utilité publique prononcée par le maire lors de la réalisation d’un pont dans un village.

La différence entre un acte qui porte grief et celui qui ne le fait pas

Pour faire la distinction entre ces deux types d’actes, il faut examiner lesquels réforment l’ordonnancement juridique. C’est ceux-là qui portent grief, les autres étant de simples actes.

Au titre des actes qui n’agissent pas sur l’ordonnancement juridique, on peut citer :

  • Les actes préparatoires

Encore appelés mesures préparatoires, ce sont des actes qui annoncent une action future. Ils servent à donner la position d’une autorité administrative par rapport à une situation ou un évènement, permettant ainsi de savoir dans quel sens l’autorité agira.

Exemple pratique : Lorsqu’une loi est en étude au parlement, une commission spécialisée s’occupe de donner les avis techniques sur cette loi.

  • Le cas des circulaires

Les circulaires qui n’ont aucun effet contraignant, mais qui servent juste à expliquer ou à donner d’interprétation sur des règles relatives au fonctionnement d’une administration.

  • Le cas des mesures d’ordre intérieur

On entend par mesure d’ordre intérieur une mesure qui est propre à une administration donnée. En règle générale, elle ne revêt pas un intérêt particulier pour les administrés. Très souvent, on dénote aujourd’hui de telles mesures d’ordre intérieur dans les administrations publiques où le respect de la discipline est le leitmotiv.

Exemple : Un soldat n’ayant pas exécuté une corvée que lui a confiée son supérieur se voit infliger une punition. Celle-ci constitue une mesure d’ordre intérieur.

À l’opposé de cette sous-catégorie, nous l’avons précisé, un acte juridique qui modifie l’ordre juridique sera considéré comme faisant grief. On peut se demander alors, quel est l’intérêt d’une telle distinction entre ces actes ? La réponse est qu’un recours pour excès de pouvoir ne peut être dirigé qu’à l’encontre des actes qui font grief. On suppose en effet que ces actes ont la possibilité d’influer sur la situation juridique des administrés.

Rappelons que le recours pour excès de pouvoir est lancé par le justiciable lorsque l’administration en prenant sa décision viole les droits de celui-ci.

Les initiateurs de l’acte administratif unilatéral

L’administration, on le sait, n’est pas une personne physique faite de chair et sang. Elle est une personne morale composée de plusieurs autorités administratives qui la font fonctionner. Ainsi, dire que l’administration prend un acte unilatéral, revient tout simplement à dire que ce sont les personnes privées ou les personnes publiques qui la composent qui ont pris l’acte administratif unilatéral.

À la question : quel type de personne privée ou de personne publique peut être à l’origine d’un acte administratif unilatéral, nous pouvons donner les réponses suivantes.

Pour le cas spécifique des personnes privées, avant qu’elles ne prennent des actes administratifs unilatéraux, il leur est fait obligation d’avoir la gestion du service public de l’État. À ce niveau encore, les décisions administratives prises doivent respecter deux conditions :

Tout d’abord, l’auteur de l’acte administratif unilatéral doit avoir pris la décision administrative au moment où il exécutait sa mission de service public. Ensuite, dans ce cadre, la décision individuelle doit procéder de l’usage de la prérogative de puissance publique dont il est titulaire au moment de sa mission.

Il faut mentionner que le non-respect de l’une de ces conditions fait de l’acte administratif unilatéral une simple décision de droit privé.

Enfin, précisons que tout acte administratif qui provient de personnes privées gérant les établissements publics à caractère industriel et commercial n’est pas automatiquement qualifié d’acte administratif unilatéral. Encore faut-il que ce soit un acte règlementaire lié directement à l’organisation de l’établissement public.

Présentation du régime juridique de l’acte administratif unilatéral

Dans cette section, nous répondrons à trois questions importantes : comment est élaboré un acte administratif unilatéral ? Quid de son application ? Comment disparait un acte administratif unilatéral ?

Comment l’acte unilatéral est-il élaboré ?

Pour répondre à cette question, il faut d’abord déterminer si l’autorité qui a pris l’acte administratif unilatéral est compétente, et si ensuite elle a suivi la procédure requise à l’élaboration de l’acte.

Le critère de la compétence

Pour édicter un acte administratif unilatéral, ce sont les textes et règlements qui précisent, eux-mêmes, ceux qui ont qualité à le faire.

Exemple pratique : Posons-nous la question de savoir qui peut signer les décrets en droit français ? Il faut faire recours à la constitution pour le savoir. En la matière, la loi fondamentale précise que lorsqu’un décret est délibéré en conseil des ministres, c’est le Président de la République qui a vocation à apposer sa signature.

Mais pour rentrer dans les détails, le critère de la compétence se divise en trois sous-branches.

Tout d’abord, il faut noter la compétence matérielle. À ce niveau, ce qui compte, c’est plutôt le champ d’application dans lequel doit rester l’autorité qui prend l’acte administratif unilatéral.

Exemple pratique : La délivrance de permis de construire est de l’attribution de la collectivité territoriale, et donc du conseil communal. Toute autre autorité qui délivrerait un permis de construire serait dans l’illégalité et l’annulation de l’acte sera prononcée par le juge administratif.

Ensuite vient la question de la compétence temporelle. À ce niveau, ce qui importe c’est la période de temps dans laquelle doit être pris l’acte administratif unilatéral.

Exemple pratique : Un arrêté préfectoral qui interdit le rassemblement de plus de dix personnes pendant une période de 2 semaines ne peut être traité d’illégal. En effet, au regard du contexte particulier lié à la pandémie du Covid 19, la compétence temporelle du préfet se justifie lorsqu’il prend cet arrêté en toute légalité.

Enfin, il faut mentionner la compétence territoriale. À ce niveau, c’est le ressort territorial couvert par l’autorité qui est remise en question. En effet, elle ne doit pas prendre un acte administratif unilatéral qui sort de la portion du territoire qui est sous son administration.

Exemple pratique : « Arrêt Commune de Morsang-sur-Orge », un arrêt fondamental en droit administratif. Les arrêtés municipaux ne sont circonscrits qu’aux domaines des communes dans lesquels ils sont pris. Un maire ne peut prendre un arrêté à vocation nationale.

Le schéma ci-dessous fait le récapitulatif des critères de compétence.

Pour ce qui concerne la compétence territoriale, il est utile de mentionner le cas où une autorité administrative est supplée à une autre pour raison d’absence. Dans ces cas désignés sous le nom d’intérim, tous les actes unilatéraux pris par l’intérimaire sont considérés comme valables.

Il en va de même pour la délégation. Certains actes relevant de la compétence d’une puissance publique sont confiés à une autre par le jeu de la délégation : on parle alors de délégation de compétence. En revanche, si la délégation porte sur des documents administratifs, on parlera de délégation de signature.

Le critère procédural

La recherche d’avis des organismes clés

Dans certains cas, l’élaboration des actes administratifs passe par l’avis donné par certains organismes indispensables. En effet, les textes obligent que ces organismes soient consultés et que leurs avis soient recueillis avant que ne soit pris l’acte administratif unilatéral.

Les organismes peuvent rendre deux types d’avis. L’avis de certains organismes est simple, ce qui voudra dire que la puissance publique n’est pas tenue de s’y conformer. D’autres rendent des avis conformes, dans ces cas-ci, l’autorité administrative ne peut passer outre et doit s’y conformer.

Le principe du contradictoire préalable

Le législateur a prévu que dans certains cas, avant que l’acte administratif unilatéral ne soit pris, l’administration avise ceux contre qui l’acte agira ou le bénéficiaire. Lorsque ces cas se présentent, la procédure se déroule de cette manière :

Le destinataire reçoit notification de la procédure à suivre. Lorsqu’il est question d’une sanction à son encontre, son dossier doit lui être communiqué. Enfin, le destinataire doit justifier d’un délai raisonnable en vue de préparer sa réponse à l’administration. Ce n’est alors que l’administration peut procéder à la délibération de la question.

La nécessité de motivation de l’acte administratif unilatéral

Lorsqu’un texte ne le prévoit pas, l’acte émanant d’une autorité administrative n’a point besoin d’être motivé. On conçoit donc que l’administration prenne des décisions implicites sans à avoir à se justifier, ni à en donner nécessairement les raisons. Dans cette même perspective, les décisions de l’administration bénéficient du privilège du préalable.

Cependant, en cas d’actes individuels défavorables, la loi oblige l’autorité administrative à en donner la motivation.

L’acte administratif unilatéral n’est pas forcément écrit

Les procédures varient d’une administration à une autre, et d’un type d’acte à l’autre. Par conséquent, s’il n’est pas fait obligation à l’administration de ne prendre un acte administratif unilatéral que par écrit, celle-ci peut s’en passer. C’est ce qui justifie l’existence d’actes verbaux.

Exemple pratique : En droit administratif français, lorsqu’une situation fait l’objet d’un recours auprès de l’administration, et qu’il est constaté le silence de l’administration sur un délai de deux mois, la loi reconnait que l’administration a pris un acte unilatéral verbal. En effet, le silence gardé pendant ce délai équivaut à l’acceptation par l’administration de la requête introduite par l’administré.

Comment s’applique l’acte administratif unilatéral ?

Deux points vont nous intéresser dans cette partie : son entrée en vigueur et son exécution.

Le cas de son entrée en vigueur

S’il s’agit d’un acte réglementaire, il est d’abord exigé l’accomplissement de toutes les formalités liées à la publication de l’acte administratif unilatéral. Deux possibilités de publicité existent : soit l’insertion au niveau du Journal officiel de la République ou alors l’acte administratif unilatéral est oublié par la voie d’affichage.

S’il s’agit d’un acte individuel favorable, dès qu’il est signé, il devient valide. Mais si la décision est défavorable, il faut qu’elle soit d’abord notifiée au destinataire.

Toutefois, il est important de préciser le principe de non-rétroactivité de l’action de l’administration. De façon plus claire, une décision de l’administration ne peut être rétroactive en saisissant des situations antérieures à elle.

Le cas de son exécution

Un acte administratif unilatéral doit être respecté. Mais si ce n’est pas le cas, l’autorité administrative ne peut obliger les administrés à son exécution. Elle ne peut que lancer des sanctions à l’encontre de ceux-ci sur le plan pénal ou administratif. Mais compte tenu du fait que l’administration déroge aux règles de droit commun, il lui est possible d’exiger une exécution forcée de l’acte administratif unilatéral.

C’est le cas lorsqu’une situation d’urgence se pose à l’administration. C’est aussi le cas lorsque les actes ne sont pas manifestement illégaux.

Comment disparait l’acte administratif unilatéral ?

Deux situations permettent de mettre fin à un acte administratif unilatéral

L’abrogation de l’acte administratif unilatéral

L’effet premier de l’abrogation d’un acte administratif unilatéral, c’est que celui-ci cesse d’exister pour le futur. À ce niveau également, il n’existe pas de rétroactivité. Les situations antérieures sont considérées comme consommées. C’est pour le futur que l’acte n’existe plus.

Cependant, les actes unilatéraux ne peuvent être abrogés par des décisions implicites de l’administration : elle doit clairement prendre un texte pour le faire.

Le retrait de l’acte administratif unilatéral

Quant au retrait, elle s’applique autant aux situations à venir qu’à celles qui ont déjà eu cours dans le passé. Le retrait n’obéit donc pas au principe de non-rétroactivité mentionné ci-dessus.

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GUERIN

Très bonne explication !!